Publication du reporting pays par pays : censure du Conseil constitutionnel

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Publication du reporting pays par pays : censure du Conseil constitutionnel
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Les Sages viennent de rendre leur décision sur la constitutionnalité de la loi Sapin II. Le Conseil a censuré l'une des mesures les plus emblématiques de cette loi ; la publication du reporting pays par pays. Selon les Sages, cette publicité serait contraire à la liberté d'entreprendre.

Le principe du reporting pays par pays

Le reporting pays par pays s'inscrit dans un vaste mouvement de lutte contre les pratiques d'optimisation fiscale abusives des multinationales. Sur la base des recommandations de l'OCDE à ce sujet, l'article 21 de la loi de finances pour 2016 a instauré l'obligation pour les groupes réalisant un chiffre d'affaires consolidé excédant 750 millions € de transmettre à l'administration fiscale un reporting pays par pays (article 223 quinquies du CGI). Cette déclaration oblige ces grands groupes à présenter un certain nombre d'agrégats, précisés par le décret n° 2016-1288 du 29 septembre 2016 (chiffre d'affaires, bénéfice, impôt, etc.) avec une répartition pays par pays.

Initialement, cette obligation devait être mise en place pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016. Mais la loi Sapin 2 prévoit une entrée en vigueur après l'adoption d'une directive européenne similaire et au plus tard au 1er janvier 2018.

La censure des Sages

La loi Sapin II allait beaucoup plus loin sur ce sujet. L'article 137 prévoyait de rendre public, les données du reporting pays par pays, afin notamment d'exposer les multinationales à la pression des consommateurs sur leurs pratiques fiscales. Le Conseil constitutionnel a néanmoins considéré que cette publication allait permettre aux concurrents d'avoir accès à des informations stratégiques en matière industrielle et commerciale, ce qui porterait une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre.

Extrait décision n°2016-741 DC : Loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique  

S'agissant de l'article 137 de la loi déférée qui instaure un « reporting fiscal » pays par pays, le Conseil constitutionnel a, dans le prolongement de sa jurisprudence antérieure, estimé que l'obligation faite à certaines sociétés de rendre publics des indicateurs économiques et fiscaux pays par pays est de nature à permettre à l'ensemble des opérateurs qui interviennent sur les marchés où s'exercent ces activités, et en particulier à leurs concurrents, d'identifier des éléments essentiels de leur stratégie industrielle et commerciale. Le Conseil constitutionnel a donc jugé que les dispositions de l'article 137 portent une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre et sont ainsi contraires à la Constitution. 

Dans cette décision, les Sages se sont prononcés sur d'autres mesures prévues par la loi Sapin II. La définition du lanceur d'alertes a été invalidée, mais l'aide financière offerte par le défenseur des droits a été censurée.

Enfin, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution, l'article 123 qui prévoit une augmentation des amendes encourues en cas d'irrespect des règles en matière de délais de paiement entre clients et fournisseurs (relèvement de 375.000 euros à 2 millions d’euros du plafond de l’amende administrative).

Source : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2016/2016-741-dc/communique-de-presse.148311.html