Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement instaurant un mécanisme de lutte contre la fraude à la TVA obligeant les acquéreurs ou preneurs en cas d'achat d'un montant supérieur à un plafond, à les déclarer immédiatement à l'administration. Alors que le Gouvernement s'opposait à cette mesure, la jugeant trop difficile techniquement à mettre en œuvre, elle a finalement été maintenue en nouvelle lecture.
Les fraudes à la TVA : de lourdes pertes pour le budget de l'État
Cet amendement, codifié à l'article 51 ter du projet de loi de finances pour 2017 vise à lutter contre les fraudes à la TVA dont le coût pour l'État s'élèverait à au moins 14 milliards € par an selon les dernières estimations du ministère des Finances. Une part substantielle de ce coût est généré par les fraudes à la TVA dite "carrousel". Ce type de montage nécessite au moins 3 intervenants venant d'au moins 2 États membres de l'Union européenne différents.
La fraude est rendue possible grâce au système d'autoliquidation de la TVA applicable aux opérations intracommunautaires (article 262 ter I du CGI). La fraude consiste pour une société éphémère ou taxi à acheter des marchandises en provenance d'Union européenne (acquisition intracommunautaire, autoliquidation en principe, pas de TVA à avancer) et à revendre ces biens à une entreprise française avec de la TVA facturée, TVA que la société taxi ne va jamais reverser à l'État. Le client final demeure le bénéficiaire de l'opération alors que son achat donne l'image d'une opération légale sur la forme (il est généralement complice de la société éphémère). C'est ce qui rend complexe le démantèlement de ce type d'opération.
Déclaration en ligne obligatoire pour les gros achats
Pour limiter ces pratiques, l'amendement adopté propose d'obliger les acquéreurs ou preneurs à déclarer en temps réel en ligne, à l'administration fiscale, leurs achats dont le montant excède la première limite mentionnée au second alinéa du II de l'article 302 septies A (soit 863.000 €) ou dont la somme excède cette limite pour un même vendeur au terme d'une période de 3 mois. La déclaration n'est pas demandée si la livraison n'est pas soumise à TVA ou s'il s'agit d'une prestation de services qui doit être autoliquidée par le preneur.
En cas de suspicion de fraude à la TVA, les agents de l'administration fiscale pourront réaliser des contrôles et prendre des mesures conservatoires en consignant le montant de la TVA.
Si ces gros achats ne sont pas déclarés en ligne, dans les 24 heures de leur inscription en comptabilité, l'acquéreur s'expose à une amende qui peut atteindre 2 % de la somme non déclarée qui excède le seuil de 863.000 €.
L'amende n'est néanmoins pas applicable lorsqu'il est établi que la TVA a été régulièrement versée au Trésor public par le fournisseur.
Malgré les réticences du ministère des Finances, cette disposition a été conservée en seconde lecture. En Espagne et au Portugal , des mesures analogues existent déjà.
Le projet de loi de finances pour 2017, doit faire l'objet d'un vote en lecture définitive ce mardi à partir de 17 heures.
Article 51 ter du projet de loi de finances pour 2017
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le I de la section VII du chapitre Ier du titre II de la première partie du livre Ier est complété par un H ainsi rédigé :
« H. - Signalement des achats
exposés au risque de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée« Art. 289 E. - Aux fins de se prémunir contre le risque d'être impliqués dans un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, les assujettis peuvent signaler par voie électronique les achats de biens ou de prestations de services réalisés auprès d'un autre assujetti dans les vingt-quatre heures de leur inscription en comptabilité, au sens du 3° du I de l'article 286, ou de leur enregistrement dans les contrôles documentés mentionnés au 1° du VII de l'article 289. Le signalement précise pour chaque opération, d'une part, le numéro d'identification mentionné à l'article 286 ter par lequel le vendeur est identifié et, d'autre part, la base d'imposition de la livraison de biens ou de la prestation de services déterminée au a du 1 de l'article 266.
« Le signalement est obligatoire pour les achats de biens dont le montant excède la première limite mentionnée au second alinéa du II de l'article 302 septies A ou dont la somme excède cette limite pour un même vendeur au terme d'une période de trois mois. Toutefois, le signalement n'est pas obligatoire si la livraison n'est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ou si la taxe est due par l'acquéreur, le destinataire ou le preneur en application de l'article 283. » ;
2° Le 3 de l'article 272 et le premier alinéa du 4 bis de l'article 283 sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« Cette disposition n'est pas applicable si le signalement des achats prévu à l'article 289 E a été effectué dans les conditions prévues à cet article, sauf lorsque l'acquéreur s'est prêté comme auteur ou comme complice à des manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie. » ;
3° Le 2 du B de la section I du chapitre II du livre II est complété par un article 1729 C bis ainsi rédigé :
« Art. 1729 C bis. - Le défaut de production dans le délai prescrit du signalement des achats mentionné à l'article 289 E, lorsque celui-ci est obligatoire, entraîne l'application d'une amende égale à 2 % de la différence entre le montant à signaler et la première limite mentionnée au I de l'article 302 septies A. L'amende est plafonnée par année à 0,1 % de la somme des achats pour laquelle elle est applicable lorsque l'assujetti a mis en oeuvre un dispositif de signalement des informations requises dans des conditions de fiabilité définies par décret en Conseil d'État. Elle n'est pas applicable lorsqu'il est établi que la taxe mentionnée dans la facture d'achat a été régulièrement versée au Trésor public par le fournisseur. »
II. - L'article L. 252 B du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. - Lorsque le procès-verbal mentionné à l'article L. 80 F fait apparaître :
« 1° Les deux faits suivants :
« a) La taxe sur la valeur ajoutée afférente à une livraison de biens est devenue exigible dans les conditions prévues au a du 2 de l'article 269 du code général des impôts sans que soit échue l'obligation déclarative prévue à l'article 287 du même code ;
« b) Le montant obtenu par application des taux prévus aux articles 278 à 281 nonies dudit code à la base des opérations taxables réalisées jusqu'à la date du procès-verbal précité au titre de la période comprise dans la prochaine obligation déclarative et sous déduction de la taxe déductible dans les conditions prévues aux articles 271 à 273 septies C du même code excède le montant de taxe sur la valeur ajoutée compris dans les factures émises durant les douze mois précédant la livraison mentionnée au a du présent 1° ;
« 2° Et que les circonstances sont susceptibles de menacer le recouvrement de la taxe ;
« le comptable peut, dans la limite du premier montant mentionné au du 1°, procéder à la saisie à tiers débiteur de la créance dont le redevable est détenteur auprès du destinataire de la livraison à raison de celle-ci. La saisie est notifiée à l'un et à l'autre et mentionne les délais et voies de recours. Elle emporte l'effet prévu à l'article L. 523-1 du code des procédures civiles d'exécution à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée. Le comptable ne peut en demander le paiement avant que soit échue l'obligation déclarative mentionnée au a du 1°. » ;
2° Au premier alinéa du II, après la référence : « I », sont insérés les mots : « ou de la saisie à tiers débiteur mentionnée au I bis » ;
3° Le III est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en va de même pour la saisie à tiers débiteur mentionnée au I bis du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle vise. »
III. - Le second alinéa de l'article 289 E et l'article 1729 C bis du code général des impôts sont applicables aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2018.