Report en arrière des déficits : rétroactivité antérieure à 2011 contraire à la Constitution

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Report en arrière des déficits : rétroactivité antérieure à 2011 contraire à la Constitution
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Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.

Le Conseil constitutionnel vient de déclarer contraire à la Constitution, l'application rétroactive du plafonnement du report en arrière des déficits aux exercices clos antérieurement au 21 septembre 2011.

La limitation du report en avant et du report en arrière des déficits

L'article 2 de la 2nde loi de finances rectificative 2011 a réformé le report en avant et le report en arrière des déficits, en instaurant un plafond d’imputation à compter des exercices clos au 21 septembre 2011 :

  • Report en avant : le déficit constaté au cours d’un exercice ne peut être déduit du bénéfice de l’exercice suivant que dans la limite de 1 million €, majoré de 60% du bénéfice excédant ce seuil (la limite de 60% a été abaissée à 50% par la loi de finances pour 2013 pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2012.
  • Report en arrière (ou carry-back) : le déficit ne peut être reporté en arrière que dans la limite du montant le plus faible entre le bénéfice déclaré au titre de l’exercice précédent et un montant de 1 million €.

Cette réforme a tout d'abord fait naître un doute sur la portée temporelle du report en arrière. L'article 31 de la loi de finances rectificative pour 2011 du 28 décembre 2011 a levé cette interrogation en précisant  que la nouvelle limitation de report à 1 million € concernait les déficits subis au titre des exercices clos à compter du 21 septembre 2011 mais également le stock de déficits encore en report à la clôture de l’exercice précédent.

La rétroactivité du carry-back antérieure à 2011 contraire à la Constitution

Cette précision de la dernière loi de finances rectificative pour 2011 a fait l'objet d'une requête auprès du Conseil d'État par la société Alinéa. Elle conteste la légalité de cette mesure qui rend applicable la limitation du report en arrière à des exercices antérieurs avant l'adoption de ce plafonnement.

En conséquence, le Conseil d'État a saisi le Conseil constitutionnel d'une QPC (question prioritaire de constitutionnalité, décision n°401696 du 13 octobre 2016).

Les Sages ont rendu leur décision ce mardi. Ils ont estimé que cette disposition était en effet contraire au principe constitutionnel de la garantie des droits proclamée par l'article 16 de la Déclaration de 1789. En conséquence, la limitation du report en arrière des déficits ne peut s'appliquer aux déficits constatés avant l'entrée en vigueur de cette disposition (exercices clos au 21 septembre 2011). Les litiges à ce sujet non jugés définitivement à ce jour doivent donc tenir compte de cette censure. 

Extrait, Décision n° 2016-604 QPC du 17 janvier 2017

7. En l'espèce, il résulte de l'absence de disposition expresse contraire que ce paragraphe II ne disposait que pour l'avenir. La réforme du régime du report en arrière des déficits prévue par ce paragraphe s'appliquait donc aux seuls déficits constatés au titre des exercices clos à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi du 19 septembre 2011. 

8. Les dispositions contestées sont issues du paragraphe II de l'article 31 de la loi du 28 décembre 2011. Selon ces dispositions, auxquelles le paragraphe III de cet article 31 confère un « caractère interprétatif », la réforme du régime du report en arrière des déficits s'applique non seulement aux déficits constatés au titre des exercices clos à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi du 19 septembre 2011, mais aussi aux déficits qui restaient à reporter à la clôture de l'exercice précédant le premier exercice clos à compter de cette même date. 

9. Ce faisant, les dispositions contestées ont remis en cause les options exercées postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 19 septembre 2011 pour le report en arrière des déficits reportables à la clôture de l'exercice précédant le premier exercice clos à compter de cette entrée en vigueur. 

10. Or, en application de l'article 220 quinquies du code général des impôts, l'exercice de l'option pour le report en arrière « fait naître au profit de l'entreprise une créance » sur l'État. Ainsi, dans la mesure où elles remettent en cause des créances dont le fait générateur était intervenu avant leur entrée en vigueur, les dispositions contestées portent atteinte à des situations légalement acquises. Dès lors que cette atteinte n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général suffisant, ces dispositions méconnaissent la garantie des droits proclamée par l'article 16 de la Déclaration de 1789. 

11. Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, la référence « , II » figurant au paragraphe IV de l'article 2 de la loi du 19 septembre 2011 doit donc être déclarée contraire à la Constitution. 

- Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 

12. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. 

13. En l'espèce, aucun motif ne justifie de reporter les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité. Celle-ci intervient donc à compter de la date de publication de la présente décision. Elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites et non jugées définitivement à cette date. 

Source : http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2017/2016-604-qpc/decision-n-2016-604-qpc-du-17-janvier-2017.148478.html