Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Dans un arrêt rendu hier, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a déclaré contraire à la directive européenne "mère-filiale", le principe de la contribution additionnelle à l'IS. L'État français va devoir modifier sa législation.
Une contribution déjà récemment réformée
Instaurée par la loi de finances rectificative pour 2012, la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés s'applique aux dividendes perçus par les sociétés soumises à l'IS. Les dividendes versés par les PME, les OPCVM et les sociétés membres d'un même groupe intégré fiscalement sont en revanche exonérés.
Ce dernier cas d'exonération a fait l'objet d'une saisie du Conseil constitutionnel par le Conseil d'État. Par une décision du 30 septembre 2016, les Sages avaient déclaré cette exonération contraire au principe d'égalité devant la loi et les charges publiques.
En effet, jusqu'en 2016, une société bénéficiant des dividendes d'une de ses filiales intégrée fiscalement était exonérée de contribution contrairement aux dividendes perçus de filiales non intégrées, et notamment des filiales étrangères qui ne peuvent être intégrées fiscalement. Afin de se mettre en conformité avec la Constitution, le précédent Gouvernement a aménagé cette exonération à l'article 95 de la loi de finances rectificative pour 2016. Depuis le 1er janvier 2017, les sociétés détenues à 95% au moins par une société mère sont exonérées de cette taxe, même les dividendes perçus de sociétés étrangères, à condition que ces dernières soient soumises à un impôt équivalent à l'IS dans leur pays.
L'arrêt de la CJUE
Le Conseil d'État avait également ouvert un nouveau front sur la validité de cette contribution, en saisissant la CJUE pour un renvoi préjudiciel (décision du 27 juin 2016). Cette demande était notamment appuyée par l'AFEP (Association française des entreprises privées) et 17 multinationales françaises (dont Total, Engie, Orange, Vivendi).
Le renvoi pose la question de la conformité de la contribution additionnelle à l'IS avec l’article 5 de la directive 2011/96/UE du Conseil, du 30 novembre 2011 relatif au régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents. Cet article expose notamment que les bénéfices distribués par une filiale située dans un État membre à sa société mère située dans un autre État membre, doivent soit faire l'objet d'une exonération de ces bénéfices entre les mains de la société mère, soit faire l'objet d'une imposition en lui autorisant néanmoins la déduction du montant de son impôt la fraction de l'impôt de la filiale afférente à ces bénéfices. L'objectif de cette directive est d'éviter la double imposition de ces bénéfices.
La législation française a retenu le principe de l'exonération d'impôt sur les sociétés sur ces dividendes pour les sociétés optant pour le régime mère et filiale, à l'exception d'une quote-part pour frais et charges à hauteur de 5% de ces dividendes. La question posée est donc de déterminer si la contribution additionnelle à l'IS de 3% assis sur les dividendes perçus n'équivaut pas à une imposition de ces distributions, ce qui est contraire à la directive européenne.
Extrait arrêt CJUE du 17 mai 2017, affaire C-365/16
C’est dans ces conditions que le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) L’article 4 de la directive mères-filiales, et notamment son paragraphe 1, sous a), s’oppose-t-il à une imposition telle que celle prévue à l’article 235 ter ZCA du CGI qui est perçue à l’occasion de la distribution de bénéfices par une société passible de l’impôt sur les sociétés en France et dont l’assiette est constituée par les montants distribués ?
2) En cas de réponse négative à la première question, une imposition, telle que celle prévue à l’article 235 ter ZCA du CGI, doit-elle être regardée comme une “retenue à la source”, dont sont exonérés les bénéfices distribués par une filiale en vertu de l’article 5 de cette directive ? »
Conformément a l'avis de l'avocat général, la CJUE a déclaré contraire à la directive mère et filiale, la contribution additionnelle à l'IS.
Extrait arrêt CJUE du 17 mai 2017, affaire C-365/16
Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :
L’article 4, paragraphe 1, sous a), de la directive 2011/96/UE du Conseil, du 30 novembre 2011, concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents, telle que modifiée par la directive 2014/86/UE du Conseil, du 8 juillet 2014, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une mesure fiscale prévue par l’État membre d’une société mère, telle que celle en cause au principal, prévoyant la perception d’un impôt à l’occasion de la distribution des dividendes par la société mère et dont l’assiette est constituée par les montants des dividendes distribués, y compris ceux provenant des filiales non-résidentes de cette société.
L'Exécutif français va donc devoir rapidement proposer un ajustement de sa législation. Une suppression totale de cette contribution pourrait être envisagée.