Cet article a été publié il y a 7 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Dans une décision rendue ce vendredi 19 mai, le Conseil constitutionnel vient de censurer la législation prévoyant pour les groupes intégrés fiscalement que le calcul du taux de la CVAE soit réalisé à partir du chiffre d’affaires du groupe (Décision n°2017-629 du 19 mai 2017). Cette décision pourrait être lourde de sens pour les finances de l’Etat.
La CVAE dans un groupe intégré
Le montant de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) est déterminé en multipliant la valeur ajoutée produite par l’entreprise par un taux. Ce taux est obtenu à partir d’une formule qui varie en fonction du chiffre d’affaires. Plus le chiffre d’affaires de l’entreprise est élevé, et plus le taux est élevé. Il peut atteindre jusqu’à 1,5% (taux applicable aux entreprises dont le chiffre d’affaires excède 50 millions €).
L’article 1586 quater du CGI prévoit un calcul dérogatoire du taux de CVAE pour les groupes intégrés fiscalement au sens de l’article 223A du CGI dont la société mère dispose d’un chiffre d’affaires qui excède 7.630.000 €. Pour ces sociétés intégrées, le taux est obligatoirement déterminé par référence au chiffre d’affaires du groupe, et non en fonction du chiffre d’affaires de la société. Ainsi, une société dont le chiffre d’affaires est de 1 million € mais qui fait l’objet d’une intégration fiscale dans le cadre d’un groupe réalisant un chiffre d’affaires de 100 millions € sera soumise au taux de CVAE de 1,5% car le CA du groupe excède 50 millions €. En l’absence d’intégration fiscale, la société serait redevable d’une CVAE au taux 0,1% (soit 0,5 x [(1 million - 500.000 €) /2,5 millions €]. En revanche, la valeur ajoutée à retenir est bien celle de la société et non celle du groupe. Cette législation permet d’éviter les comportements abusifs d’optimisation dans le cadre des groupes. Sans cette règle, les groupes pourraient être tentés de se scinder en plus d’entités de manière à avoir des chiffre d’affaires plus faibles dans chaque société et donc des taux de CVAE plus faibles.
La décision du Conseil constitutionnel
Le Conseil d’Etat a récemment été saisi sur ce régime par une société qu’il l’estime contraire au principe d’égalité devant la loi. Le Conseil d’Etat a en conséquence saisit le 2 mars dernier le Conseil constitutionnel d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur ce point.
Dans leur décision rendue ce vendredi, les Sages ont effectivement constaté qu’un même groupe intégré fiscalement ou non n’était pas soumis aux mêmes dispositions. Si le Conseil estime qu’une différence de traitement est justifiée par un motif d’intérêt général visant à s’opposer aux comportements d’optimisation résultant d’opérations de restructuration, il considère que le critère d’option ou non au régime d’intégration fiscale n’est pas en adéquation avec le but poursuivi par la loi. Est ainsi contraire à la Constitution, le fait qu’un groupe qui dispose de plus de 95% du capital de ses filiales (taux minimum pour intégrer fiscalement une société) ne soit pas soumis aux mêmes règles de détermination de la CVAE selon qu’il opte ou non pour l’intégration.
Le législateur aurait tout intérêt à modifier prochainement cette législation pour tenir compte de cette décision.
Extrait décision n° 2017-629 QPC du 19 mai 2017 - Société FB Finance
Le Conseil constitutionnel a jugé que si le législateur pouvait prévoir des modalités de calcul du dégrèvement spécifiques aux sociétés appartenant à un groupe, il ne pouvait distinguer entre ces groupes selon qu'ils relèvent ou non du régime de l'intégration fiscale, dès lors qu'ils peuvent tous réaliser des opérations de restructuration susceptibles de conduire à une optimisation. Le critère de l'option en faveur du régime de l'intégration fiscale n'était donc pas en adéquation avec l'objet de la loi.
Le Conseil constitutionnel a en conséquence déclaré contraires à la Constitution le premier alinéa du paragraphe I bis de l'article 1586 quater du CGI, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.