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L'article 7 du projet de loi de finances pour 2018 modifie les règles de détermination de la base imposable à la CVAE pour les groupes. Avec cette nouvelle disposition, le Gouvernement tire les conséquences de la censure du Conseil constitutionnel dans sa décision du 19 mai 2017.
La récente censure du Conseil constitutionnel
La CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) est un impôt égal à la valeur ajoutée produite par l’entreprise multipliée par un taux qui dépend du niveau du chiffre d'affaires du redevable. Ce taux est proportionnel au niveau du chiffre d'affaires et est plafonné à 1,5% pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 50 millions €.
Pour les groupes intégrés fiscalement au sens de l’article 223A du CGI, l'article 1586 quater du CGI a instauré à compter de 2011 des modalités différentes de détermination du taux d'imposition. Il est déterminé pour ces sociétés intégrées en prenant en compte le chiffre d’affaires du groupe, et non celui de la société. Cette législation augmente en conséquence le taux d'imposition des sociétés membres d'un groupe intégré fiscalement et permet d’éviter les comportements d’optimisation fiscale abusive (notamment des scissions d'activités pour payer moins de CVAE).
Le 2 mars 2017, le Conseil d'État a saisi le Conseil constitutionnel d'une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) au sujet de la CVAE payée par les groupes intégrés.
Dans leur décision rendue le 19 mai 2017 (décision n° 2017-629 QPC du 19 mai 2017), les Sages ont déclaré cette modalité de calcul pour les groupes intégrés contraire à la Constitution. Ils ont estimé que la différence de traitement au titre de la CVAE due entre les groupes intégrés fiscalement et ceux qui ne le sont pas n'était pas justifiée par un motif d'intérêt général.
Cette décision a entraîné des conséquences immédiates. Dès les acomptes de juin et septembre 2017, les sociétés membres d'un groupe intégré ont pu calculer leur taux de CVAE en fonction de leur chiffre d'affaires au lieu de celui de leur groupe.
Les sociétés concernées pourront également réclamer un dégrèvement à l'administration au titre de la CVAE payée en trop compte tenu de l'imposition en fonction du chiffre d'affaires du groupe. En la matière, les demandes doivent être déposées au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle du versement de l'impôt. La CVAE due au titre de 2015 (et versée en 2016) devra faire l'objet d'une demande au plus tard au 31 décembre de cette année. Pour la CVAE due au titre de 2016, les redevables ont jusqu'au 31 décembre 2018 pour présenter leur réclamation.
PLF 2018 : le taux déterminé en fonction du chiffre d'affaires groupe
Compte tenu de la décision du Conseil constitutionnel, le Gouvernement n'avait d'autres choix que de légiférer en la matière. L'article 7 du projet de loi de finances pour 2018 prévoit ainsi que la CVAE due par les sociétés membres d'un groupe serait désormais toujours déterminée en fonction du chiffre d'affaires du groupe, que ce dernier soit intégré ou non.
Si la mesure ne changerait rien pour les groupes intégrés, avant la censure du Conseil constitutionnel, il en est tout autre pour les groupes non intégrés qui constateraient dans la plupart des cas une hausse de la CVAE globale due au niveau du groupe. Dans tous les cas, c'est une bonne nouvelle pour les collectivités territoriales qui éviteraient ainsi une baisse substantielle de leurs recettes fiscales.
Extrait des motifs, article 7 du projet de loi de finances pour 2018
Dans une décision rendue le 19 mai 20171, le Conseil constitutionnel a jugé que les modalités de calcul du taux effectif de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour les sociétés membres d'un groupe étaient contraires à la Constitution. En effet, alors que ce taux est établi en fonction du chiffre d'affaires réalisé, la loi prévoit d'apprécier ce montant au niveau du groupe pour les sociétés fiscalement intégrées à l'impôt sur les sociétés (IS). Le Conseil constitutionnel a jugé que, si une différence de traitement pouvait être admise entre les groupes et les autres sociétés par un motif d'intérêt général consistant à faire obstacle aux comportements d'optimisation, le renvoi au régime de l'intégration fiscale en matière d'IS rendait cette disposition contraire à la Constitution, dès lors que tout groupe de sociétés – fiscal ou non – est susceptible de réaliser des opérations de restructuration visant à optimiser son imposition.
En conséquence, le présent article propose d’appliquer la consolidation du chiffre d’affaires, non plus aux seules sociétés fiscalement intégrées, mais à l'ensemble des sociétés satisfaisant aux conditions de détention du capital pour faire partie d’un groupe fiscal. Cette nouvelle disposition s’appliquerait à compter de la CVAE due au titre de 2018.
Par ailleurs, la valeur ajoutée des entreprises implantées dans plusieurs collectivités est répartie entre elles au prorata, pour le tiers, des valeurs locatives foncières imposées en matière de cotisation foncière des entreprises (CFE) et, pour les deux tiers, de l’effectif salarié. Le présent article modifie ces modalités de répartition de la CVAE à double titre.
D'une part, pour favoriser les territoires accueillant des établissements industriels, qui peuvent notamment engendrer des externalités particulières (pollutions, risques divers, besoins en infrastructures), les effectifs et les valeurs locatives des établissements pour lesquelles les immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) excèdent 20 % de la valeur locative totale sont surpondérés à hauteur d'un coefficient de 5. Or, la révision des valeurs locatives des locaux professionnels prévue par la loi de finances rectificative pour 2010 et qui est entrée en vigueur en 2017 a pour effet de réaligner les valeurs locatives des locaux professionnels sur les valeurs de marché. Toutefois, elle ne concerne pas les locaux industriels, dont les valeurs locatives demeurent inchangées. Dès lors, afin de maintenir le poids des établissements industriels dans la clé de répartition de la CVAE, le présent article propose d'augmenter le coefficient de pondération des valeurs locatives de ces établissements.
D'autre part, l’article 51 de la loi de finances rectificative pour 2016 prévoit, à compter de 2018, une répartition de la valeur ajoutée des entreprises membres d’un groupe fiscal en fonction des valeurs locatives foncières et des effectifs salariés de l’ensemble des établissements des entreprises membres du groupe. Or, l’application de ces nouvelles modalités conduirait à une variation de la CVAE perçue par les collectivités territoriales décorrélée de l’activité économique de leur territoire, à une perte de lisibilité et de prévisibilité, en matière de perception de la CVAE, pour ces mêmes collectivités et au renforcement des obligations déclaratives de près de 50 000 entreprises. Pour ces raisons, le présent article propose l’abrogation de l’article 51 de la loi de finances rectificative pour 2016.