Cet article a été publié il y a 6 ans, il est donc possible qu'il ne soit plus à jour.
Le Conseil constitutionnel a validé hier l’instauration d’une contribution exceptionnelle visant les grandes entreprises dans le cadre du premier projet de loi de finances rectificative pour 2017 (PLFR 2017-I). Cet impôt doit permettre de financer au moins en partie, les demandes de remboursement issues de la censure de la taxe sur les dividendes.
2 contributions
Le Gouvernement peut enfin être rassuré, les Sages ont validé la création de la contribution exceptionnelle. Le déficit budgétaire pour 2017 devrait ainsi pouvoir descendre en dessous de 3% du PIB. Afin de financer les conséquences de la censure par le Conseil constitutionnel en octobre dernier, de la taxe de 3% sur les dividendes, le Gouvernement s’est résolu à créer rapidement une contribution exceptionnelle dans le cadre d’un premier PLFR 2017, présenté début novembre, soit seulement un mois après la censure et 15 jours avant la présentation du second PLFR 2017.
2 contributions ont en réalité été instaurées :
- La contribution exceptionnelle à l’IS pour les sociétés dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard €
- La contribution additionnelle pour les sociétés dont le chiffre d’affaires est supérieur ou égal à 3 milliards €.
Les sociétés de plus de 3 milliards € de chiffre d’affaires seront donc soumises aux 2 contributions. Elles se calculent de la même manière. Leur montant s’élèvera à 15% de l’IS dû par les sociétés avant imputation des réductions et crédits d’impôt.
En conséquence, les sociétés concernées verront leur taux d’imposition global sur les bénéfices atteindre 39,43% et même 44,43% pour celles soumises aux deux contributions.
Afin de pouvoir intégrer l’essentiel de ces recettes sur l’année 2017, le Gouvernement a instauré un règlement sous la forme d’un acompte à hauteur de 95% du montant estimé des contributions, au plus tard pour le 20 décembre. Le solde est à verser au même moment que le solde d’IS.
L’adoption de ce PLFR 2017 ne s’est pas fait sans mal puis que par deux fois le Sénat, où LREM ne dispose pas de la majorité, s’est opposé à ce nouvel impôt. La Commission mixte paritaire n’étant pas parvenue à aboutir à un texte commun, le budget rectificatif n’a été adopté qu’en 3ème et dernière lecture par les députés, le 14 novembre dernier. Dès le lendemain, plus de 60 sénateurs ont saisi le Conseil constitutionnel.
Pas de censure par le Conseil constitutionnel
Dans une décision rendue publique ce mercredi 29 septembre, le Conseil constitutionnel a rejeté les 3 arguments des sénateurs et a validé ce PLFR 2017-I.
Les sénateurs critiquaient en premier lieu la procédure d’adoption de la loi qui a été définitivement votée en moins de 15 jours. Les Sages ont rétorqué que les consultations préalables avaient été réalisées et que les parlementaires avaient eu la possibilité de déposer des amendements. Ils contestent également l’argument de la non-sincérité des lois financières.
Enfin, les sénateurs évoquaient le non-respect par ces contributions du principe d’égalité devant la loi et les charges publiques compte tenu du fait que seules 320 sociétés seraient concernées par ces taxes.
Les Sages ont jugé que cette situation était en rapport avec l’objet de la loi et que la circonstance selon laquelle certains redevables de cette contribution n’étaient pas soumis à la taxe sur les dividendes, censurée le 6 octobre 2017, était sans incidence.
Le caractère rétroactif et imprévisible (non budgété par les sociétés concernées) a également été rejeté. Le fait générateur de ces taxes interviendra bien postérieurement à son entrée en vigueur, et l’acompte de 95% ne confère pas de caractère rétroactif.
Cette décision peut encore faire l’objet d’un dernier recours devant la CJUE (Cour de justice de l’Union européenne).
Extrait communiqué de presse décision n°2017-755 du Conseil constitutionnel (29 novembre 2017)
À ce titre, le Conseil constitutionnel juge notamment qu'il est loisible au législateur, lorsqu'il institue un impôt, de ne pas le faire reposer sur l'ensemble des contribuables, à la condition de ne pas créer de différence de traitement injustifiée. En l'espèce, le législateur n'était pas tenu d'étendre aux personnes physiques les impositions auxquelles il a assujetti certaines personnes morales.
Il juge en outre qu'en prévoyant que sont assujettis aux deux contributions exceptionnelles instituées par l'article 1er les redevables de l'impôt sur les sociétés réalisant un chiffre d'affaires supérieur à un milliard d'euros ou égal ou supérieur à trois milliards d'euros, le législateur a entendu imposer spécialement les grandes entreprises. En retenant comme critère d'assujettissement un chiffre d'affaires élevé, le législateur s'est ainsi fondé sur un critère objectif et rationnel, qui caractérise une différence de situation entre les redevables de l'impôt sur les sociétés de nature à justifier une différence de traitement en rapport avec l'objet de la loi. Contrairement à ce que soutenaient les recours, la circonstance que tous les redevables des contributions contestées ne bénéficient pas ou peu des dégrèvements et remboursements de la taxe prévue par l'article 235 ter ZCA censuré par la décision n° 2017-660 QPC du 6 octobre 2017 est sans incidence à cet égard. […]En deuxième lieu, les recours invoquaient la méconnaissance par l'article 1er de la loi des exigences de l'article 16 de la Déclaration des de 1789, au regard duquel le Conseil constitutionnel juge que s'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, il ne saurait toutefois, ce faisant, priver de garanties légales des exigences constitutionnelles. En particulier, il ne saurait, sans motif d'intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations.
Au cas présent, le Conseil constitutionnel relève que, d'une part, les dispositions contestées créent des contributions dues au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 2017 et jusqu'au 30 décembre 2018. Le fait générateur de ces impositions interviendra donc après leur entrée en vigueur. Or, aucune règle constitutionnelle n'interdit au législateur de modifier un régime fiscal existant en créant une nouvelle imposition dont le fait générateur est postérieur à son institution. D'autre part, le fait que ces deux contributions donnent lieu au 20 décembre 2017 au versement d'un acompte de 95 % de leur montant estimé ne leur confère pas un caractère rétroactif. […]
Lire aussi : Toutes les actualités | Conseil constitutionnel
http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/actualites/2017/decision-du-29-novembre-755-dc-[lfr-2017].150230.html