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Le ministre de l’Action et des Comptes publics a annoncé ce matin sur BFM TV qu’il allait soutenir un amendement d’Emilie Cariou au projet de loi relative à la fraude fiscale réduisant de manière drastique la procédure appelée « verrou de Berçy ». La Commission des finances de l’Assemblée nationale a adopté cet amendement mercredi soir.
Le verrou de Bercy : un dispositif très critiqué
Le projet de loi relative à la fraude fiscale a été présenté en Conseil des ministres le 28 mars dernier. Il a pour objectif de mieux détecter, appréhender et sanctionner la fraude. Le projet initial ne prévoyait pas de supprimer ce que l’on appelle le « verrou de Bercy ». Cette procédure spécifique, prévue à l’article 228 du livre de procédure fiscale accorde un monopole aux services fiscaux du ministère en charge des Finances pour poursuivre les personnes soupçonnées de fraude fiscale. Dans cette procédure, l’administration fiscale joue le rôle de Procureur de la République. La loi prévoit néanmoins l’obligation en amont pour l’administration de saisir pour avis la CIF (commission des infractions pénales).
Ce dispositif est très contesté par les parlementaires et les magistrats dans la mesure où il contrevient au principe constitutionnel de séparation des pouvoirs. Lors du projet de loi « Pouvoirs publics : confiance dans l’action publique », un amendement supprimant ce verrou avait été rejeté par l’Assemblée nationale à une courte majorité, en juillet 2017.
L’amendement du Sénat
Lors des débats en première lecture au Sénat, en début de mois, un amendement a été retenu, réduisant l’usage de ce fameux verrou. 3 critères cumulatifs ont été instaurés. Leur dépassement impose la transmission automatique des dossiers à la justice. Les 3 critères retenus étaient :
- un certain montant de fraude à fixer par décret
- l’application de pénalités d’au moins 80% (manœuvre frauduleuse)
- la réitération des faits.
Le nouvel amendement déposé
Depuis mardi, le projet de loi est discuté par la commission des finances de l’Assemblée nationale. Un amendement proposé par la députée LREM Emilie Cariou, également raporteuse du texte va encore plus loin que le Sénat. Il a été adopté ce mercredi soir en commission des finances.
Il prévoit que dans les cas où le montant de la fraude excède 100.000 € et que le montant des pénalités applicables atteigne 80 ou 100% ou même 40% en cas de récidive, les faits seront automatiquement dénoncés et transmis au Parquet. Ce dernier sera le seul à juger de l’opportunité d’exercer des poursuites ou non, comme pour toutes les autres plaintes ne relevant pas du domaine fiscal.
Dans ces cas précis, la CIF ne sera plus consultée. Elle garde néanmoins une utilité et continuera d’être consultée par l’administration fiscale pour les fraudes inférieures à 100.000 € si la gravité des faits le justifie.
Cet amendement adopté a le soutien du ministre de l’Action et des comptes publics. Il a en effet annoncé ce matin sur BFM TV qu’il souhaitait que ce soit le Parlement qui fixe des critères permettant d’écarter le verrou de Bercy et qu’il soutiendrait un amendement d’Emilie Cariou en ce sens.
Cette évolution semble indispensable. Actuellement, moins de 1.000 dossiers sur environ 500.000 contrôles par an seraient transmis à la justice. Cet amendement pourrait doubler ce nombre.