Fraude fiscale : définition et sanctions
La fraude fiscale est définie à l’article 1741 du CGI (code général des impôts).
Extrait article 1741 du CGI
Sans préjudice des dispositions particulières relatées dans la présente codification, quiconque s'est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la présente codification, soit qu'il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt, soit qu'il ait organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d'autres manoeuvres au recouvrement de l'impôt, soit en agissant de toute autre manière frauduleuse, est passible, indépendamment des sanctions fiscales applicables, d'un emprisonnement de cinq ans et d'une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction.
Elle est passible :
- Dans le cas général : d’une peine d’emprisonnement de 5 ans et d’une amende de 500.000 € pouvant être portée au double du produit tiré de l’infraction
- En cas de circonstances aggravantes : d’une peine d’emprisonnement de 7 ans et d’une amende de 3.000.000 € pouvant être portée au double du produit tiré de l’infraction.
L’article 106 de la loi de finances pour 2018 a porté de 2 à 3 millions € l’amende encourue en cas de circonstances aggravées. Cette qualification est notamment retenue lorsqu’elle est commise en bande organisée ou facilitée par l’usage d’un faux (faux document, fausse identité).
La durée de la peine d’emprisonnement encourue par l'auteur ou le complice est réduite de moitié lorsqu’il a averti l'autorité administrative ou judiciaire et a permis d'identifier les autres auteurs ou complices.
On rappelle que ces sanctions pénales s’additionnent aux sanctions fiscales issues d’un contrôle fiscal (pénalités, majorations, intérêts de retard, etc.).
Sanctions complémentaires
Sauf décision contraire spécialement motivée par le juge, ce dernier doit obligatoirement prononcer les peines complémentaires suivantes lorsque la fraude fiscale est retenue :
- l'interdiction des droits civiques, civils et de famille (article 131-26 du code pénal)
- la diffusion et l’affichage de la décision (article 131-35 et 131-39 du code pénal).
Le prononcé obligatoire par le juge de ces peines a été instauré respectivement par l’article 106 de la loi de finances pour 2018 et par l’article 16 de la loi de lutte contre la fraude (23 octobre 2018).
La condamnation à l’inéligibilité ne peut excéder 5 ans (10 ans à l’encontre d’une personne exerçant une fonction de membre du Gouvernement ou un mandat électif public au moment des faits).
En cas de condamnation pour fraude fiscale, l'article 114 de la loi de finances pour 2024 permet en outre de prononcer une peine complémentaire de privation du droit au bénéfice de réductions ou crédits d'impôt sur le revenu ou de réduction d'IFI (impôt sur la fortune immobilière), pour une durée maximum de 3 ans.
La procédure pénale pour fraude fiscale
La procédure pénale nécessite un dépôt de plainte auprès des forces de police judiciaire ou directement auprès du Procureur de la République. Ce dernier peut notamment :
- classer l’affaire sans suite
- déclencher une enquête voire faire nommer un juge d’instruction si l’affaire est complexe
- engager des poursuites (renvoyer l’affaire devant le tribunal correctionnel).
Pour la fraude fiscale, la procédure de dépôt de plainte est particulière. Dans les cas les plus graves de fraude fiscale, c’est-à-dire en cas « d’atteinte aux intérêts de la collectivité », seule l’administration fiscale peut déposer une plainte auprès du Procureur de la République et seulement après que la commission des affaires fiscales ait rendu un avis conforme. Ce dispositif est traditionnellement appelé « verrou de Bercy ». Cette procédure a pour but d’éviter le cumul systématique des sanctions fiscales et pénales. Mais elle était également très critiquée pour son manque de transparence. Les avis de la commission des affaires fiscales ne sont en effet pas toujours motivés.
Néanmoins, l’article 36 de la loi de lutte contre la fraude du 23 octobre 2018 a assoupli le verrou de Bercy. L’administration fiscale doit désormais obligatoirement transmettre au Procureur de la République sans avis nécessaire de la commission des affaires fiscales, tous les cas de manquement à des obligations fiscales dont les droits excèderaient 100.000 € et pour lesquels une majoration de 100, 80 ou 40% dans certains cas aurait été appliquée.
Extrait article L228 du livre des procédures fiscales, modifié par l’article 36 de la loi n°2018-898 du 23 octobre 2018
Sans préjudice des plaintes dont elle prend l'initiative, l'administration est tenue de dénoncer au procureur de la République les faits qu'elle a examinés dans le cadre de son pouvoir de contrôle prévu à l'article L. 10 qui ont conduit à l'application, sur des droits dont le montant est supérieur à 100 000 € : 1° Soit de la majoration de 100 % prévue à l'article 1732 du code général des impôts ; 2° Soit de la majoration de 80 % prévue au c du 1 de l'article 1728, aux b ou c de l'article 1729, au I de l'article 1729-0 A ou au dernier alinéa de l'article 1758 du même code ; 3° Soit de la majoration de 40 % prévue au b du 1 de l'article 1728 ou aux a ou b de l'article 1729 dudit code, lorsqu'au cours des six années civiles précédant son application le contribuable a déjà fait l'objet lors d'un précédent contrôle de l'application des majorations mentionnées aux 1° et 2° du présent I et au présent 3° ou d'une plainte de l'administration.
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Le Conseil constitutionnel doit prochainement se prononcer sur la validité de ce dispositif. Il a été saisi le 1er juillet 2019 par le Conseil d’État, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, suite à une demande de l’Afep (association française des entreprises privées).
L’article 37 de la loi du 23 octobre 2018 autorise en outre les directions nationales et spécialisées de contrôle fiscal à déposer elles-mêmes des plaintes pour fraude fiscale.
Enfin, les fraudes fiscales peuvent faire l’objet d’une transaction fiscale, c’est-à-dire d’un accord amiable avec le contribuable.