Objet d'une provision pour dépréciation concernant un fonds de commerce

Jurisprudence
Impôt sur les sociétés

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Contexte de l'affaire

CE 30-6-2016 no 380916

Des provisions pour dépréciation sont constatées lorsque la dépréciation de certains éléments d'actif ne présente pas de caractère irréversible et ne peut donc être constatée par le biais d'amortissements. Elles doivent être constituées en vue de faire face à des pertes ou des charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables.

En l'espèce, une société avait comptabilisé une provision destinée à prendre en compte la dépréciation de son fonds de commerce. Malgré le fait que la société avait développé son réseau en procédant à des acquisitions d'agences à titre onéreux, tout en apportant à d'autres sociétés certaines des agences déjà acquises, elle avait maintenu sa provision, compte tenu des circonstances internationales négatives. L'administration remit en cause cette provision, au motif que celle-ci portait sur un objet différent de celui qui avait motivé la comptabilisation, compte tenu de l’évolution de la structure du fonds de commerce inscrit à l’actif. Les juges du fond lui donnèrent raison

Le Conseil d'Etat remet en cause cette analyse, en arguant le fait que la provision passée conservait le même objet (soit la dépréciation du fond de commerce) et n'avait pas à être réintégrée dans les résultats de la société. Le fait que les événements justifiant celle-ci seraient différents de ceux ayant motivé sa constitution initiale est sans effet.

La Haute juridiction considère que la Cour d'appel aurait du rechercher si la société justifiait le montant de la provision constatée à la clôture de l'exercice litigieux.

Extrait de l'arrêt

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'au titre de son exercice clos en 1996, la SAS X a comptabilisé une provision d'un montant de 1 455 159 euros destinée à prendre en compte la dépréciation de son fonds de commerce, compte tenu de l'incidence des pertes d'exploitation subies au cours des exercices antérieurs et du montant auquel a été valorisé son fonds à l'occasion de sa cession en 1996 à la société de droit canadien Y. ; qu'entre 1996 et 2003, la SAS X a développé son réseau en procédant, à compter de l'année 2001, à des acquisitions d'agences à titre onéreux, tout en apportant à d'autres sociétés certaines des agences acquises en 1994 ; que la SAS X a toutefois maintenu, au titre de son exercice 2003, l'inscription d'une provision pour dépréciation du fonds de commerce d'un même montant, compte tenu de l'appréciation qu'elle faisait alors des effets négatifs sur ses résultats des événements internationaux survenus en septembre 2001 ainsi que du changement des modes de consommation dans le secteur du tourisme ;

Considérant que la cour a jugé que l'administration était fondée à rapporter la provision constatée au bilan de l'exercice 2003 aux résultats de cet exercice, au motif que cette provision portait sur un objet différent de celui qui avait motivé la comptabilisation de la provision initialement inscrite au titre de son exercice 1996 compte tenu de l'évolution de la structure du fonds de commerce inscrit à l'actif de la SAS X ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, la société pouvait constater à la clôture de son exercice 2003 une provision pour dépréciation de son fonds de commerce correspondant à la provision ayant le même objet initialement passée au titre de l'exercice 1996, même si les événements rendant probable la dépréciation à la clôture de l'exercice 2003 n'étaient pas les mêmes que ceux qui l'avaient initialement justifiée ; que faute d'avoir recherché si la société justifiait le montant de la provision constatée à la clôture de l'exercice litigieux, la cour a commis une erreur de droit ;

Cour de cassation du , arrêt n°380916

Commentaire de LégiFiscal

La solution dégagée par le Conseil d'Etat est intéressante. En effet, même si les circonstances ayant entraîné la constatation d'une provision pour dépréciation ont considérablement changé (ce qui est le cas en espèce), celle-ci peut être conservée à l'actif si son objet initial a perduré. En effet, l'objet de celle-ci est la dépréciation du fonds de commerce, quelle que soit la consistance de celui-ci. Les évolutions constatées ne sauraient avoir pour effet de conduire à regarder ce fonds comme un fonds nouveau.