Contexte de l'affaire
Cons.const. Déc 22 juillet 2016 n°2016-554
La question de la constitutionnalité de l'amende de 5% pour non-déclaration d'un compte à l'étranger a été posée au Conseil constitutionnel. Cette pénalité a été instaurée par la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012.
En l'espèce, un contribuable avait fait valoir, devant le Conseil d'Etat, que la pénalité de 5% prévue par l'article 1736 IV du CGI méconnaît le principe constitutionnel d'égalité devant la loi pénale en ce que les mêmes faits sont susceptibles de donner lieu à l'application de sanctions différentes selon que la sanction est prononcée sur le fondement du code général des impôts ou du code monétaire et financier.
Le Conseil d'Etat considère que les dispositions en cause n'ont pas été déclarées conformes par une décision du Conseil constitutionnel et que le contribuable soulève une question présentant un caractère sérieux. De ce fait, il convient de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.
Le Conseil juge que l'amende de 5% est inconstitutionnelle car elle est encourue même dans l'hypothèse où les sommes figurant sur les comptes n'ont pas été soustrait frauduleusement à l'impôt et de ce fait, est disproportionnée.
Extrait de la décision
7. L'amende prévue par les dispositions contestées, qui réprime l'absence de déclaration annuelle des comptes bancaires ouverts, utilisés ou clos à l'étranger, est fixée en pourcentage du solde de ces comptes dès lors que le total de ces soldes excède 50 000 euros au 31 décembre de l'année. Cette amende est encourue même dans l'hypothèse où les sommes figurant sur ces comptes n'ont pas été soustraites frauduleusement à l'impôt. En prévoyant une amende proportionnelle pour un simple manquement à une obligation déclarative, le législateur a instauré une sanction manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu'il a entendu réprimer. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, les dispositions contestées, qui méconnaissent le principe de proportionnalité des peines, doivent être déclarées contraires à la Constitution.
8. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration.
En l'espèce, aucun motif ne justifie de reporter la date de l'abrogation des dispositions contestées. Par conséquent, la déclaration d'inconstitutionnalité du deuxième alinéa du paragraphe IV de l'article 1736 du code général des impôts dans sa rédaction issue de la loi du 14 mars 2012 prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle est applicable aux amendes prononcées sur le fondement du paragraphe IV de l'article 1736 du code général des impôts avant la date de la décision du Conseil constitutionnel et qui n'ont pas donné lieu à un jugement devenu définitif ou pour lesquelles une réclamation peut encore être formée.
Commentaire de LégiFiscal
Cette décision s'applique aux amendes prononcées avant celle-ci et qui n'ont pas donné lieu à un jugement devenu définitif ou pour lesquelles une réclamation peut encore être portée.