Constitutionnalité de la retenue à la source de 75% sur les revenus payés dans un Etat ou territoire non coopératif (ETNC)

Jurisprudence
Revenus de placements

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Contexte de l'affaire

CE 8e-3e ch. QPC 14-9-2016 n° 400867

L'article 187 du Code Général des impôts prévoit un prélèvement à la source de 75%, applicable aux revenus distribués dans un Etat ou territoire non coopératif.

Lors d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat à l'encontre de la doctrine administrative du BOFIP BOI-RPPM-RCM-3-30-10-20 commentant cet article, une société soulève une question prioritaire de constitutionnalité sur les dispositions de celui-ci. En effet, elle considéra que cette retenue à la source méconnait le principe d’égalité devant les charges publiques garanti par l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le principe de légalité des délits et des peines garanti par l’article 8 de cette même Déclaration et le principe de liberté d’entreprendre garanti par l’article 4 de la Déclaration.

Le Conseil d'Etat considère, que si le taux de 75% a été validé par le Conseil constitutionnel, l'article 187 susvisé institueraient une présomption irréfragable empêchant le contribuable d’apporter la preuve que les opérations litigieuses ont principalement un objet et un effet autre que de permettre la localisation de ces distributions dans un ETNC. Il pourrait ainsi porter atteinte à l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Ainsi, la question de constitutionnalité soulevée présente un caractère sérieux et doit être renvoyée au Conseil constitutionnel.

Extrait de l'arrêt

3. Considérant qu’à l’appui de sa demande d’annulation du 3e point du paragraphe 10 de l’instruction fiscale publiée le 13 avril 2016 au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-RPPM-RCM-3-30-10-20, lequel rappelle les dispositions citées au point 2 ci-dessus, la société X soulève une question prioritaire de constitutionnalité sur les dispositions du 2 de l’article 187 du code général des impôts dans leur rédaction issue de la loi du 30 décembre 2009 de finances rectificative pour 2009 modifiée par la loi de finances du 29 décembre 2012 pour 2013?; qu’elle soutient que cette retenue à la source méconnait le principe d’égalité devant les charges publiques garanti par l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le principe de légalité des délits et des peines garanti par l’article 8 de cette même Déclaration et le principe de liberté d’entreprendre garanti par l’article 4 de la Déclaration?;

4. Considérant qu’hormis le taux qu’elles fixent, qui a été validé par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012, ces dispositions, applicables au litige, n’ont pas été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel?; que la question de savoir si elles portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe d’égalité devant les charges publiques garanti par l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, compte tenu de ce qu’elles institueraient une présomption irréfragable empêchant le contribuable d’apporter la preuve que les opérations auxquelles correspondent les sommes taxées ont principalement un objet et un effet autre que de permettre la localisation de ces distributions dans un État ou territoire non coopératif, présente un caractère sérieux?; qu’ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée?;

Cour de cassation du , arrêt n°400867

Commentaire de LégiFiscal

La question de la constitutionnalité de la loi fiscale est fréquemment soulevée en ce moment et les renvoies devant le Conseil constitutionnel sont assez nombreux.

En l'espèce, si la constitutionnalité du taux de 75% prévu à l'article 187 du CGI n'est pas remise en question, se pose la question de la charge de la preuve. En effet, cet article ne permettrait pas au contribuable d'apporter une preuve contraire, ce qui serait une atteinte à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Il convient de voir si le Conseil constitutionnel suit cette analyse.