Contexte de l'affaire
CAA Paris 20-10-2016 n° 15PA02520
En l'espèce, durant un contrôle fiscal, le vérificateur avait eu certains comportements problématiques:
- des documents comptables avaient été irrégulièrement emportés,
- la proposition de rectification était insuffisamment motivée,
- le vérificateur avait comparé le total des factures d’achat avec le montant figurant au bilan, alors que le bilan comprenait d’autres postes, incorrectement analysé les variations du stock et appliqué une double imposition à la taxe sur la valeur ajoutée,
- l'intérêt de retard était excessif,
- le vérificateur s'était livré à des pressions afin de recevoir des espèces,
- il avait été pris en flagrant délit après avoir reçu une enveloppe contenant des espèces que lui avait remises le contribuable sur les conseils des services de police.
Le vérificateur avait par ailleurs été placé en détention provisoire et avait été mis en examen pour corruption passive.
Les juges du fond considèrent que le contribuable, eu égard de ces agissements, est fondé à soutenir que la vérification de comptabilité dont résultent les impositions en litige ne s’est pas déroulée, dans les circonstances de l’espèce, dans des conditions loyales. Il a donc été privé de la garantie d'un contradictoire. Il doit donc être déchargé des impositions mises à sa charge, même si la proposition de rectification a été signée par le responsable de la brigade de vérification. Celui-ci s’est en effet borné à s’approprier et à exploiter les informations qui avaient été obtenues par son subordonné dans des conditions irrégulières.
Extrait de l'arrêt
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 13 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : «?Les agents de l’administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (…)?»?; que le vérificateur qui procède à la vérification sur place de la comptabilité d’un contribuable est tenu, dans le cadre du déroulement des opérations de contrôle, à un devoir de loyauté, qui inclut une exigence de probité à l’égard de ce contribuable?; 3. Considérant que M. A… soutient, pour la première fois en appel, que le vérificateur a manqué au devoir de loyauté qui lui incombait, dans la mesure où il s’est livré à des pressions, au cours des opérations de contrôle sur place, dans le but de se faire remettre des espèces en contrepartie d’une atténuation des résultats du contrôle fiscal?; qu’il résulte en effet de l’instruction que le vérificateur a été arrêté en flagrant délit par les services de police, prévenus par M. A…, après avoir récupéré une enveloppe contenant des espèces que lui avait remise le contribuable sur les conseils des services de police?; que le vérificateur, placé immédiatement en détention provisoire, a été mis en examen du chef, notamment, de corruption passive par personne chargée d’une mission de service public?; que le premier juge d’instruction du Tribunal de grande instance de Paris a ensuite adressé à M. A… un avis à victime, l’informant de l’ouverture de cette information judiciaire et de la possibilité qui lui était ouverte de se constituer partie civile?; que M. A… produit d’ailleurs un article de presse qui fait état de l’interpellation du vérificateur lors de la remise d’une enveloppe contenant des espèces, avant que soit établie la proposition de rectification?; que les faits invoqués par M. A…, qui ne sont au demeurant pas contestés par le ministre, sont ainsi établis?; que, dans ces conditions, et sans que soit méconnu le principe de la présomption d’innocence ni mise en cause l’indépendance de la procédure pénale, M. A… est fondé à soutenir qu’eu égard au comportement du vérificateur au cours du contrôle sur place, la vérification de comptabilité dont résultent les impositions en litige ne s’est pas déroulée, dans les circonstances de l’espèce, dans des conditions loyales?; qu’à cet égard, le ministre ne saurait utilement se prévaloir de ce que la proposition de rectification n’a pas été établie par le vérificateur mais par le responsable de la brigade de vérification, dès lors que celui-ci, qui n’est intervenu qu’après l’achèvement des opérations de contrôle sur place, s’est borné à s’approprier et à exploiter les informations qui avaient été obtenues par son subordonné dans des conditions irrégulières?; que, par suite, M. A… est fondé à soutenir que l’administration a manqué au devoir de loyauté qui lui incombait, cette circonstance l’ayant nécessairement privé d’une garantie?; que M. A… est dès lors fondé à soutenir que la procédure d’imposition est entachée d’irrégularité et à demander la décharge des impositions auxquelles il a été assujetti à l’issue de cette procédure, ainsi que des pénalités correspondantes?;
Commentaire de LégiFiscal
La Cour administrative d'appel défend les droits du contribuable et rappelle que des impositions supplémentaires ne peuvent être mises à sa charge lorsque la procédure est entachée d'irrégularité flagrante.