Contexte de l'affaire
CE 19 juin 2017 n°395452
Le crédit bail immobilier est une opération permettant à une entreprise (le crédit bailleur) de donner en location des biens immobiliers à usage professionnel, achetés par elle ou construits pour son compte, lorsque cette opération permet aux locataires de devenir propriétaires des bien loués, au plus tard à l'expiration du bail ou lors de la levée anticipée de l'option d'achat. Pendant la durée du contrat, le preneur peut déduire les loyers qu'il doit payer.
Il faut réintégrer dans le résultat imposable de celui-ci, lors de la levée d'option, une partie des loyers déduits. Le montant de la réintégration est égal à :
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la valeur de l’immeuble lors de la signature du contrat (terrain compris),
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diminuée du prix de la levée d'option, du montant des amortissements que le preneur aurait pu déduire s’il avait été propriétaire de l’immeuble pendant la période au cours de laquelle il a été titulaire du contrat et des loyers non déductibles
En l'espèce, une société avait pris en crédit bail un immeuble et avait levé par anticipation l'option d'achat. A la suite de la vérification de comptabilité du preneur l'administration considéra que celui-ci avait omis, lors de la levée d'option d'achat, de réintégrer la totalité de la valeur de l'immeuble à l'actif de son bilan. En effet, elle avait acquis cet immeuble à un prix inférieur à celui stipulé dans le contrat de crédit bail.
Les juges du fond donnèrent raison à l'administration et ainsi la société fit un pourvoi en cassation.
Le Conseil d'Etat rejette les arguments de la société. En effet, pour lui, il faut regarder la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat, sans qu'il y ait lieu de la diminuer d'une subvention consentie par une collectivité publique au bailleur.
Or en l'espèce, la différence entre la valeur inscrite dans le contrat et la valeur d'acquisition correspond à une subvention consentie au bailleur.
Extraits de l'arrêt
2. D'une part, aux termes du I de l'article 239 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au cas d'espèce en application de l'article 239 sexies B du même code : " Lorsque le prix d'acquisition, par le locataire, de l'immeuble pris en location par un contrat de crédit-bail (...) est inférieur à la différence existant entre la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat et le montant total des amortissements que le locataire aurait pu pratiquer s'il avait été propriétaire du bien depuis cette date, le locataire acquéreur est tenu de réintégrer, dans les résultats de son entreprise afférents à l'exercice en cours au moment de la cession, la fraction des loyers versés pendant la période au cours de laquelle l'intéressé a été titulaire du contrat et correspondant à ladite différence diminuée du prix de cession de l'immeuble. Le montant ainsi déterminé est diminué des quotes-parts de loyers non déductibles en application des dispositions du 10 de l'article 39. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article 239 sexies C du même code, dans sa rédaction applicable aux contrats conclus jusqu'au 31 décembre 1995 : " (...) Le prix de revient du bien acquis à l'échéance d'un contrat de crédit-bail est majoré des sommes réintégrées en application des articles 239 sexies et 239 sexies B. La fraction du prix qui excède, le cas échéant, le prix d'achat du terrain par le bailleur, regardée comme le prix de revient des constructions est amorti sur la durée normale d'utilisation du bien restant à courir à cette date depuis son acquisition par le bailleur (...) ". Pour l'application de ces dispositions, la valeur de l'immeuble lors de la signature du contrat correspond, en principe, à celle qui y est mentionnée, sans qu'il y ait lieu de la diminuer d'une subvention consentie par une collectivité publique au bailleur, alors même que cette subvention a permis de réduire le montant de la somme à verser par l'acheteur.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et en particulier du contrat de crédit-bail du 13 décembre 1995 que si la SARL X pouvait acquérir l'immeuble litigieux en s'acquittant seulement d'une somme de 440 273 euros, à travers les loyers annuels successifs et le prix de cession dû lors de la levée d'option, la valeur de l'immeuble était néanmoins évaluée par le contrat lui-même à 987 473 euros, compte tenu des coûts liés à son acquisition et à sa rénovation par le district, la différence entre les deux montants correspondant aux subventions perçues par ce dernier au titre de l'opération. Par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit et n'a pas dénaturé les stipulations du contrat précité, en jugeant que l'administration avait pu prendre en compte, au titre de la valeur de l'immeuble prévue par les dispositions citées au point précédent, le second des deux montants.
Commentaire de LégiFiscal
Cette solution est logique, car la subvention a permis de réaliser des travaux de rénovation rendus nécessaires.