Contexte de l'affaire
CE 20 septembre 2017 n°394564
En vertu des dispositions du 1 de l'article L.247 du livre de procédures fiscales, l'administration peut accorder au contribuable des remises totales ou partielles d'impôts lorsqu'il est dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence.
En vertu du 2 du même article, des remises totales ou partielles d'amendes fiscales ou de majorations d'impôts peuvent être accordées.
Il s'agit d'un recours gracieux, insusceptible de recours (sauf pour excès de pouvoir).
En l'espèce, une société fit l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des rappels de TVA ainsi que des pénalités lui furent réclamés. Le bien fondé des sommes demandées fut confirmé par la cour administrative d'appel de Douai.
La société demanda alors la remise gracieuse des pénalités mises à sa charge. Cette demande fut rejetée. Le Tribunal administratif de Lille écarta sa demande d'annulation pour excès de pouvoir de cette décision de rejet. Elle se pourvut alors en cassation.
Le Conseil d'Etat rejette son pourvoi. En effet, lorsqu'elle se prononce sur des demandes de remise gracieuse d'impôt en application du 1° de l'article L. 247, l'administration n'est tenue de prendre en compte que la situation financière du contribuable. En revanche, lorsqu'elle se prononce sur des demandes de remise gracieuse de pénalités, elle doit également prendre en compte tous les éléments pertinents relatifs à la situation du contribuable, y compris l'intervention d'un jugement pénal.
En l'occurence, la société n'a pas invoqué, lors de son recours pour excès de pouvoir, le fait que l'administration n'a pas pris en considération, dans l'appréciation de sa situation, un arrêt de la Cour d'appel de Paris la relaxant des poursuites pénales engagées contre elle à raison des mêmes faits que ceux qui ont motivé les pénalités dont elle a demandé la remise gracieuse. Le tribunal n'avait pas à soulever d'office ce moyen.
Extraits de l'arrêt
3. Lorsqu'elle se prononce sur des demandes de remise gracieuse d'impôt en application du 1° de l'article L. 247 précité, l'administration n'est tenue de prendre en compte que la situation financière du contribuable. En revanche, lorsqu'elle se prononce sur des demandes de remise gracieuse de pénalités en application du 2° du même article, elle doit également prendre en considération tous les éléments pertinents relatifs à la situation du contribuable, y compris l'intervention d'un jugement pénal relatif au contribuable.
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société requérante n'a pas invoqué dans ses écritures, à l'appui de sa requête devant le tribunal administratif de Lille, l'erreur de droit qu'aurait commise l'administration en refusant de prendre en considération, dans l'appréciation de sa situation, l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 17 avril 2008, confirmé par la Cour de cassation le 7 octobre 2009, la relaxant des poursuites pénales engagées contre elle à raison des mêmes faits que ceux qui ont motivé les pénalités dont elle a demandé la remise gracieuse. Par suite, le tribunal, qui n'était pas tenu de soulever d'office ce moyen dès lors qu'il n'est pas d'ordre public, n'a pas commis d'erreur de droit, ni dénaturé les faits qui lui étaient soumis, en ne tenant pas compte de cette circonstance.
5. Le tribunal n'a pas non plus dénaturé les pièces du dossier dont il était saisi en jugeant que le rejet opposé à la demande de remise gracieuse n'était entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne la situation financière de la société requérante, l'invocation par cette dernière de l'évolution de sa situation postérieurement à la date d'introduction de sa requête devant le tribunal étant en tout état de cause inopérante.
Commentaire de LégiFiscal
Il convient ainsi, pour le contribuable qui fait un recours pour excès de pouvoir, de soulever l'intégralité des moyens lui permettant d'attaquer la décision litigieuse, même les plus évidents. En effet, les refus d'accorder une remise gracieuse restent difficiles à attaquer et ne peuvent être annulés que s'ils sont entachés d'incompétence, d'erreur de droit, d'erreur de fait, d'erreur manifeste d'appréciation ou encore si ils sont révélateurs d'un détournement de pouvoir.