L'exclusion du CIR des opérations de recherche effectuées à l'étranger est constitutionnelle

Jurisprudence
Fiscalité Impôt sur les sociétés Nouveauté 2017

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Contexte de l'affaire

CE QPC 26 juin 2017 n°410.437

Le crédit d'impôt recherche est assis sur les dépenses suivantes, affectées à des dépenses de recherche et développement:

      • la prise de maintenances des brevets et des certificats d'obtention végétale (COV),

      • les dépenses de veille technologique,

      • les dépenses de défense des brevets et des certificats d'obtention végétale,

      • les amortissements des immobilisations affectées à la réalisation d'opérations de recherche et développement,

      • les primes et cotisations afférentes aux contrats d'assurance de protection juridique afférents aux litiges portant sur un brevet ou un certificat d’obtention végétale (COV),

      • les dépenses de participation aux réunions officielles de normalisation,

      • les dépenses de sous traitance,

      • les frais de confection de nouvelles collections, pour les industries du textile,

      • les dépenses de personnel relatives aux chercheurs et techniciens de recherche,

      • les frais relatifs aux jeunes docteurs,

      • les dépenses de fonctionnement, fixées forfaitairement à 75% des dotations aux amortissements, 50% des dépenses de personnel et 200% des dépenses de jeunes docteurs.

Son taux est de 30%.

Concernant initialement des opérations de recherche localisée en France, il vise depuis 2004 des opérations localisées au sein de l'Union européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen.

Le requérant soutient que ces dispositions, en excluant du dispositif les opérations réalisées en dehors de l'Union européenne, méconnaissent le principe d'égalité devant la loi et le principe d'égalité devant les charges publiques qui résultent des articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Elles instaurent, au préjudice des entreprises qui doivent localiser tout ou partie de leurs opérations de recherche sur le territoire d'un Etat tiers, une différence de traitement.

Cette question de constitutionnalité est jugé comme non sérieuse par le Conseil d'Etat, qui considère que le législateur peut instaurer une différence de traitement afin d'assurer le développement et le maintien des activités de recherche privée sur le territoire national ou européen.

Extraits de l'arrêt



3. La société soutient que les dispositions du 49ème alinéa du II de l'article 244 quater B du code général des impôts citées au point 2 ci-dessus méconnaissent le principe d'égalité devant la loi et le principe d'égalité devant les charges publiques qui résultent des articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en tant qu'elles prévoient que les dépenses correspondant à des opérations de recherche localisées en dehors du territoire de l'Union européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ne sont pas éligibles au crédit d'impôt en faveur de la recherche.

4. Les principes constitutionnels d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques ne s'opposent ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. Pour assurer le respect du principe d'égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose. Par ailleurs, cette appréciation ne doit pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.

5. La société soutient que le dispositif prévu au I de l'article 244 quater B du code général des impôts est ouvert aux entreprises industrielles et commerciales ou agricoles dès lors que les dépenses qu'elles engagent pour leurs opérations de recherche sont prises en compte pour la détermination de leur résultat soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés. Elle fait valoir que la condition de territorialité prévue au 49ème alinéa du II de cet article instaure, au préjudice des entreprises qui doivent localiser tout ou partie de leurs opérations de recherche sur le territoire d'un Etat situé en dehors du territoire de l'Union européenne ou des Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen, une différence de traitement qui méconnaît les principes d'égalité et d'égalité devant les charges publiques. 

6. Il résulte des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts citées au point 2 ci-dessus que le législateur avait initialement entendu, par le dispositif du crédit d'impôt en faveur de la recherche, inciter les entreprises à localiser, maintenir et développer leurs opérations de recherche sur le territoire national. Afin d'assurer que cette mesure, qui poursuit un objectif d'intérêt général, soit mise en oeuvre dans le respect du droit de l'Union européenne, la loi en a, en 2004, étendu le bénéfice du crédit d'impôt aux entreprises, soumises à l'impôt national, qui localisent leurs activités effectives de recherche sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou, sous conditions, sur le territoire des Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen. Il existe, au regard de l'objet de la loi, une différence de situation entre les entreprises qui localisent leurs opérations de recherche sur le territoire des Etats visés au 49ème alinéa du II de l'article 244 quater B du code général des impôts et celles qui les localisent sur le territoire d'un Etat tiers. La différence de traitement établie par les dispositions contestées, qui repose sur des critères objectifs et rationnels au regard de l'objectif d'intérêt général que constituent le développement et le maintien des activités de recherche privée sur le territoire défini par la loi ainsi qu'il a été dit, est en rapport direct avec l'objet de la loi. 

7. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

Cour de cassation du , arrêt n°410437

Commentaire de LégiFiscal

Le Conseil d'Etat rappelle que la loi fiscale peut être discriminatoire afin de favoriser des intérêts nationaux.

La solution aurait été différente pour des dispositions excluant des opérations ou des entités situées dans un autre Etat membre de l'UE. En effet, elles auraient pu contrevenir au principes communautaires de libre circulation.