Constitutionnalité de l'amende de 5% concernant l'omission de déclaration des allocations pour frais d'emploi versées aux salariés.

Jurisprudence
Fiscalité Contrôle fiscal

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Contexte de l'affaire

CE 25 novembre 2017 n°413277

Les allocations pour frais d'emploi sont versées aux salariés afin de couvrir certains frais inhérents à leur fonction ou à leur emploi. Elles peuvent prendre la forme d'indemnités forfaitaires, de remboursements de frais ou d'allocations en nature.

Elles sont exonérées d'impôt sur le revenu au niveau de leur bénéficiaire, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  • il n'y a pas de cumul avec la déduction des frais réels (seuls les contribuables bénéficiant de la déduction forfaitaire de 10% peuvent bénéficier de l'exonération),

  • les allocations couvrent des frais engagés dans l'exercice de la profession ,

  • elles doivent correspondre à des dépenses professionnelles spéciales (frais de déplacement, cadeaux offerts),

  • elles correspondent à des dépenses réelles,

  • elles doivent être utilisées conformément à leur objet.

Elles doivent être déclarées par l'employeur dans la déclaration annuelle de salaires. Une amende de 5% s'applique en cas d'omission (article 1736 du CGI).

Le requérant considéra que cette pénalité est contraire au principe de proportionnalité des peines, prévu à l'article 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'elle s'applique à des allocations non soumises à l'impôt sur le revenu.

Cette question de constitutionnalité est jugée comme non sérieuse par le Conseil d'Etat. En effet, la transmission à l'administration des allocations pour frais d'emploi lui permet de contrôler que celles-ci remplissent les conditions pour être exonérées. Ainsi, la pénalité sanctionne le non-respect par l'employeur, d'une obligation déclarative permettant à l'administration d'exercer son pouvoir de contrôle.

Le législateur a entendu, avec l'amende de 5%, assurer l'efficacité des contrôles et poursuivre un but de lutte contre la fraude fiscale. En outre, la pénalité est proportionnelle aux sommes omises.

Extraits de l'arrêt

5. Les sommes à déclarer en vertu de l'article 87 précité intègrent le montant des indemnités pour frais d'emploi et des remboursements de frais professionnels octroyés par l'employeur. Ces indemnités et remboursements constituent des allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi, lesquelles sont affranchies de l'impôt sur le revenu en vertu de l'article 81 précité sous réserve d'être effectivement utilisées conformément à leur objet. Les bénéficiaires de ces allocations pour frais d'emploi ne sont pas tenus de les intégrer dans leur déclaration de revenus lorsqu'elles remplissent les conditions pour être exonérées sous réserve, en cas d'option pour la déduction de leurs frais professionnels réels, de ne pas déduire les frais couverts par ces allocations. Pour autant, la transmission à l'administration fiscale des montants des allocations pour frais d'emploi la met en situation de contrôler que ces sommes remplissent les conditions pour être exonérées et ne font pas l'objet, en cas d'option pour la déduction des frais professionnels réels, d'une double déduction.

6. En réprimant notamment le manquement à l'obligation, prévue à l'article 87 précité, de transmettre à l'administration fiscale des informations relatives aux revenus salariaux versés à d'autres contribuables, la disposition contestée sanctionne le non-respect d'une obligation déclarative permettant à cette administration de procéder aux recoupements nécessaires au contrôle du respect, par les bénéficiaires des versements mentionnés à l'article 87, de leurs obligations fiscales, ainsi que de pré-remplir les déclarations de revenus de ces derniers.

7. En fixant l'amende encourue par l'auteur des versements en proportion des sommes versées, le législateur qui a entendu assurer l'efficacité des contrôles à sa disposition a poursuivi un but de lutte contre la fraude fiscale, qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle.

8. Il a proportionné la sanction à la gravité des manquements réprimés, laquelle est appréciée à raison de l'importance des sommes non déclarées, quand bien même le Trésor public ne subirait aucun préjudice financier effectif.

9. Il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, est dépourvue de caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.

Cour de cassation du , arrêt n°413277

Commentaire de LégiFiscal

Il est rare que la question de la proportionnalité des peines soit retenue lorsque le législateur prévoit une amende proportionnelle dont le taux reste raisonnable. Ainsi, il y a une corrélation entre la pénalité et l'infraction.