Contexte de l'affaire
CE 1er février 2018 n°412155
L'amendement Charasse (article 223 B du CGI) est un dispositif de réintégration des frais financiers en cas de cession à soi même de titres de sociétés.
Ainsi, en vertu de celui-ci, la déduction des frais financiers est limitée lorsqu'une société acquiert auprès d'actionnaires qui la contrôlent ou auprès de sociétés que ces actionnaires contrôlent, les titres d'une société qui devient membre du même groupe qu'elle.
La fraction de charges financières devant être réintégrée est égale au rapport entre au numérateur le prix d’acquisition, et au dénominateur la somme du montant moyen des dettes du groupe.
En l'espèce, une société considère que l'amendement Charasse est contraire au principe d'égalité devant la loi résultant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le principe d'égalité devant les charges publiques résultant de l'article 13 de cette dernière, en ne permettant pas au contribuable d'apporter la preuve que l'opération de restructuration effectuée dans ce cadre ne revêt pas un caractère artificiel.
La question de constitutionnalité est jugée comme sérieuse par le Conseil d'Etat, qui la renvoie devant le Conseil constitutionnel.
Extraits de l'arrêt
3. Il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à réintégrer dans les résultats de la société mère d'un groupe fiscalement intégré une fraction des charges financières du groupe, lorsqu'une société est acquise en vue d'être intégrée par une société du groupe auprès d'une ou de plusieurs personnes qui contrôlent la société cessionnaire. Cette disposition est applicable, compte tenu de ce que l'existence d'un tel contrôle s'apprécie par référence aux critères définis par l'article L. 233-3 du code de commerce, non seulement dans l'hypothèse d'une identité entre le ou les actionnaires de la société cédée et le ou les actionnaires exerçant le contrôle de la société cessionnaire mais également dans le cas où l'actionnaire qui contrôlait la société cédée exerce, de concert avec d'autres actionnaires, le contrôle de la société cessionnaire.
4. La SAS X soutient, à l'appui de son pourvoi, que le septième alinéa de l'article 223 B du code général des impôts, qui a pour objet de lutter contre les montages abusifs dont le but est de réduire les résultats imposables d'un groupe faisant l'objet d'une intégration fiscale en utilisant cette intégration fiscale pour procéder à la " vente d'une société à soi-même ", en la finançant par l'emprunt, méconnaît le principe d'égalité devant la loi résultant de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le principe d'égalité devant les charges publiques résultant de l'article 13 de cette dernière, en ne permettant pas au contribuable d'apporter la preuve que l'opération de restructuration effectuée dans ce cadre ne revêt pas un caractère artificiel.
5. L'article 223 B dans sa rédaction précitée est applicable au litige. Cette disposition n'a pas été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Présente un caractère sérieux le moyen tiré de ce qu'elle porte atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques en ne ménageant pas la possibilité pour le contribuable d'apporter la preuve, dans l'hypothèse où l'actionnaire qui contrôlait la société cédée exerce, de concert avec d'autres actionnaires, le contrôle de la société cessionnaire, que l'opération ne poursuit pas qu'un but fiscal. Il y a lieu, par suite, de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
Commentaire de LégiFiscal
C'est la première fois que la question de la constitutionnalité de l'amendement Charasse est posée au Conseil constitutionnel.
On attendra avec impatience la réponse de celui-ci.