Contexte de l'affaire
CE 2 mai 2018 n°404161
En matière de TVA, le fait générateur, est le "fait par lequel sont réalisées les conditions légales nécessaires pour l'exigibilité de la taxe".
En outre, l'exigibilité est définie comme "le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à partir d'un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement peut en être reporté"(article 62 de la directive européenne 2006/112/CE). Dans le cadre du régime réel normal, les opérations dont la TVA est exigible au cours d'un mois, doivent figurer sur la déclaration mensuelle du mois suivant.
En matière de prestations de services, le fait générateur est constitué par l'exécution de la prestation, et l'exigibilité, par le paiement du prix.
En l'espèce, un contribuable était propriétaire d'un fonds de commerce, qu'il donna à louer en location gérance à une SARL A puis à une SARL B.Il ne déclara pas cette activité de loueur de fonds auprès d'un centre de formalités des entreprises et ne souscrivit pas de déclaration fiscale.
Il mit gratuitement son fonds de commerce à la disposition de la société A jusqu'au mois d'avril 2010 et de la société B à compter de cette date. Ainsi, aucun loyer ne fut facturé.
L'administration considéra qu'il avait exercé une activité occulte de loueur de fonds de commerce et l'imposa à la TVA.
Les juges du fond donnèrent raison à l'administration. Ainsi, pour la Cour administrative d'appel de Nancy, la mise à disposition gratuite du fonds de commerce s'analyse comme un encaissement suivi d'une libéralité.
Le Conseil d'Etat casse l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Nancy. En effet, pour lui, la circonstance qu'une personne ait renoncé volontairement à percevoir des redevances, alors qu'elle mettait à disposition d'un tiers un fonds de commerce, ne permet pas à l'administration d'exiger d'elle la TVA sur les sommes correspondant à la renonciation à ces créances, dès lors que la taxe ne peut porter que sur une rémunération effectivement encaissée.
Commentaires de legifiscal
2. Aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " 2. La taxe est exigible...c. Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération... ". Doit être regardée comme encaissée toute somme perçue en rémunération d'une opération soumise à la taxe sur la valeur ajoutée. La remise volontaire par le créancier d'une dette, qui constitue un mode d'extinction de l'obligation de payer mais n'entraîne la perception d'aucune somme par le créancier, n'équivaut pas pour ce dernier à un encaissement au sens de l'article précité. En conséquence, la circonstance qu'une personne ait renoncé volontairement à percevoir des redevances, alors qu'elle mettait à disposition d'un tiers un fonds de commerce, ne permet pas à l'administration d'exiger d'elle la taxe sur la valeur ajoutée sur les sommes correspondant à la renonciation à ces créances, dès lors que la taxe sur la valeur ajoutée ne peut porter que sur une rémunération effectivement encaissée.
3. En jugeant que l'abandon de créances qu'avait consenti M. A...en renonçant à percevoir les sommes qui auraient dû rémunérer la mise à disposition de son fonds de commerce à la société X au cours de la période du 1er janvier 2008 au mois d'avril 2010 procédait d'un acte de disposition qui s'analysait comme un encaissement suivi d'une libéralité envers le débiteur et qui rendait, par suite, exigible le montant de la taxe sur la valeur ajoutée en application du c du 2 de l'article 269 du code général des impôts, la cour a commis une erreur de droit.
4. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour la période au cours de laquelle, à compter de mai 2010, il a donné son fonds de commerce en location gérance à une autre société, M. A...soutenait que l'administration ne pouvait pas soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée les loyers au motif qu'il n'avait pas de lien contractuel avec cette société. En se bornant à répondre que la circonstance qu'il n'y avait plus de contrat de location entre le requérant et la première société à compter du 10 avril 2010 était sans incidence sur son activité de loueur de fonds, sans expliquer en quoi elle estimait que la taxe sur la valeur ajoutée était exigible au titre de la période du 1er mai 2010 au 31 juillet 2011, la cour a insuffisamment motivé son arrêt.
Commentaire de LégiFiscal
Solution orthodoxe du Conseil d'Etat, qui se réfère aux règles générales applicables en matière de TVA, en considérant qu'en matière de prestations de services, la TVA n'est exigible que si le prix a été effectivement encaissé. Un abandon de créance ne peut constituer un paiement.