Contexte de l'affaire
CE 5 mars 2018 416836
Le crédit d'impôt recherche bénéficie aux entreprises soumises à un régime réel d'imposition et réalisant des opérations de recherche et développement.
Son montant est égal à 30% des dépenses suivantes :
-
les dépenses liées à l'embauche de jeunes docteurs,
-
les dépenses de fonctionnement, fixées forfaitairement à 75% des dotations aux amortissements, 50% des dépenses de personnel et 200% des dépenses de jeunes docteurs,
-
la prise de maintenances des brevets et des certificats d'obtention végétale (COV),
-
les dépenses de veille technologique,
-
les dépenses de défense des brevets et des certificats d'obtention végétale,
-
les amortissements des immobilisations affectées à la recherche
-
les primes et cotisations relatives aux contrats d'assurance de protection juridique afférents aux litiges portant sur un brevet ou un certificat COV,
-
les dépenses de participation aux réunions officielles de normalisation,
-
certaines dépenses liées à la sous traitance.,
-
les frais de confection de nouvelles collections, pour les industries du textile,
-
les dotations aux amortissements,
-
les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche.
Les dépenses de sous traitance ne sont éligibles au CIR que si le sous traitant est agréé par le ministère de la recherche. Dans ce cas, ce sous-traitant ne peut lui-même prendre en compte dans la base de son propre crédit d'impôt les sommes facturées à l'entreprise donneuse d'ordre au titre des opérations en cause. En revanche, un sous traitant non agréé peut prendre en compte ces dépenses.
En outre, en vertu de la doctrine administrative, un sous traitant ne peut pas prendre en considération, dans le calcul de son crédit d'impôt, les dépenses qu’il a facturées à ses donneurs d'ordre éligibles au CIR, même si ceux-ci n’en bénéficient effectivement pas (car les plafonds sont dépassés ou parce que l'entreprise refuse de bénéficier de l'avantage fiscal)
La société requérante attaqua pour excès de pouvoir la doctrine administrative susvisée considérant qu'elle fait perdre le bénéfice du crédit d'impôt au sous traitant, alors même que le donneur d'ordre n'en a pas bénéficier. Ce recours est rejetée par le Conseil d'Etat.
En outre, la requérante considérait que le III de l'article 244 quater B est contraire aux articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de 1'homme et du citoyen, en instaurant une différence de traitement entre les organismes agréés et non agréés, ces derniers étant les seuls habilités à prendre en considération, pour le calcul de leur CIR, les dépenses sous straitées.
Cette question de constitutionnalité est rejetée par le Conseil d'Etat, qui considère que le législateur s'est fondé sur un critère objectif et rationnel en rapport avec l'objectif d'incitation poursuivi. En outre, les organismes de recherche agréés et les organismes non agréés sont placés dans des situations objectivement distinctes.
Extraits de l'arrêt
4. En instituant le dispositif du crédit d'impôt recherche, le législateur a entendu inciter les entreprises industrielles et commerciales imposées en France d'après leur bénéfice réel à investir davantage dans la recherche et le développement, en augmentant le volume des dépenses qu'elles consacrent à de telles opérations. Il a néanmoins subordonné le bénéfice de ce dispositif de faveur à des conditions tenant notamment à la qualification des opérations financées par ces dépenses et à la réalité de ces opérations. Dans un objectif de bon usage de la dépense publique, il l'a également assorti de plusieurs règles de plafonnement des dépenses éligibles et de mécanismes de contrôle de celles-ci.
6. D'autre part, les organismes de recherche agréés et les organismes non agréés sont placés dans des situations objectivement distinctes au regard du dispositif du crédit d'impôt recherche, de même que les organismes agréés selon qu'ils font le choix de répondre à des demandes émanant de donneurs d'ordre entrant eux-mêmes ou non dans le champ du I de l'article 244 quater B du code général des impôts.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du III de l'article 244 quater B du code général des impôts méconnaîtraient le principe d'égalité devant la loi fiscale et d'égalité devant les charges publiques, énoncés par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de 1'homme et du citoyen. Il suit de là que la question soulevée par la société X, qui n'est pas nouvelle, est dépourvue de caractère sérieux. Il n'y a ainsi pas lieu de la transmettre au Conseil constitutionnel.
9. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les commentaires attaqués réitèreraient des dispositions législatives portant atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ne peut qu'être écarté.
10. En troisième lieu, le dispositif du crédit d'impôt recherche, fondé sur des critères objectifs et revêtant un caractère général, n'est pas sélectif et ne saurait, dès lors, être regardé comme une aide d'Etat, au sens des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. La société Lunalogic ne peut, par suite, utilement soutenir qu'il méconnaîtrait le principe d'égalité de traitement consacré par la Cour de justice de l'Union européenne en matière d'aides d'Etat.
Commentaire de LégiFiscal
Les dernières décisions de la jurisprudence ne sont pas favorables en matière de crédit d'impôt recherche. En effet, un arrêt de la Cour administrative d'appel de Bordeaux a limité la possibilité de recourir au portage salarial (CAA Bordeaux 16 mars 2018 n°16BX00922) et un arrêt de la Cour administrative d'appel de Douai a abordé la problématique de la sous traitance (CAA Douai 11 janvier 2018 n°17DA02299)