Déduction d'une prestation compensatoire

Jurisprudence
Fiscalité Impôt sur le revenu - IRPP

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Contexte de l'affaire

CAA Lyon 29 mars 2018 n°16LY03636

Les prestations compensatoires versées sous forme d'argent durant un délai de plus de 12 mois sont déductibles du revenu global du débiteur (article 156 du CGI). Les prestations versées sous forme de capital dans les 12 mois suivant le jugement définitif du divorce peuvent faire l'objet d'une réduction d'impôt.

En l'espèce, un contribuable fit l'objet d'une procédure de divorce au terme de laquelle la cour d'appel fixa la prestation compensatoire à 240.000 euros et jugea qu'il n'y avait pas lieu que ce capital fasse l'objet d'un paiement fractionné. Il versa ce capital en trois temps, à concurrence de 88 439,42 euros le 25 août 2010, de 88 811 euros le 31 août 2010 et de 62 750 euros le 18 mai 2011 et déduisit déduit de son revenu global de l'année 2010, la somme de 177 250 euros correspondant aux deux premiers de ces versements. L'administration estima que le débiteur ne pouvait bénéficier de la réduction d'impôt et que la déduction du revenu global n'était pas possible.

La cour administrative d'appel de Lyon donne raison à l'administration, en considérant que les versements effectués sur une durée supérieure à douze mois ne peuvent s'entendre que de ceux qui l'ont été conformément aux modalités de paiement fixées par le juge. Or en l'espèce, la cour d'appel considéra que la prestation n'avait pas à faire l'objet d'un paiement fractionné et cette décision passa en force de chose jugée.

Extraits de l'arrêt

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les versements de la prestation compensatoire effectués sur une durée supérieure à douze mois au sens de l'article 156 du code général des impôts ne peuvent s'entendre que de ceux qui l'ont été conformément aux modalités de paiement fixées par le juge ; qu'en l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 1, la cour d'appel de Lyon du 8 janvier 2009 a jugé qu'il n'y avait pas lieu que la prestation compensatoire due par M. B... fasse l'objet d'un paiement fractionné ; qu'ainsi, en admettant même que cette prestation compensatoire ait été effectivement versée sur une durée de plus de douze mois à compter de la date à laquelle la décision juridictionnelle la fixant est passée en force de chose jugée, l'intéressé n'était pas fondé à en demander la déduction de son revenu global ;

6. Considérant que M. B...se prévaut du paragraphe 11 de l'instruction publiée au du Bulletin officiel des impôts du 17 juillet 2006, référencée 5-B-21-06, dans sa rédaction alors applicable, selon laquelle, en cas de versement en tout ou partie de la prestation compensatoire au-delà du délai de douze mois alors que le jugement ou la convention de divorce prévoyait que le versement devait intervenir intégralement dans le délai de douze mois, " les sommes versées sont normalement déductibles du revenu imposable du débirentier et imposables selon le régime des pensions au nom du crédirentier, avec application éventuelle du système du quotient prévu à l'article 163-0 A du CGI. / Toutefois, si les services établissent que les parties, et notamment celle tenue d'acquitter la prestation compensatoire, n'exécutent pas la décision du juge ou la convention homologuée dans les termes prévus aux seules fins d'en retirer le bénéfice d'un régime fiscal favorable, les dispositions précédentes ne leur sont pas applicables. Dans ce cas, les versements ne sont donc ni déductibles, ni imposables. / Il appartient toutefois aux services d'établir la preuve de l'intention du contribuable. Celle-ci sera réputée apportée lorsque, par exemple, le débiteur n'a pas libéré le capital dans les douze mois du jugement ayant acquis force de chose jugée, conformément au jugement ou à la convention homologuée, alors qu'il est titulaire d'un important patrimoine liquide (portefeuille de valeurs mobilières, contrats d'assurance vie (...) susceptible d'être mobilisé rapidement. " ;
7. Considérant que ces dispositions de la doctrine administrative, qui laissent un pouvoir d'appréciation à l'administration, ne sauraient ainsi être regardées comme une interprétation formellement admise du texte fiscal, dont le contribuable pourrait se prévaloir en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

Cour de cassation du , arrêt n°16LY03636

Commentaire de LégiFiscal

Solution sévère de la cour administrative, qui corrobore la doctrine administrative en date du 4 avril 2012 (BOI-IR-RICI- 160-10 n° 150) applicable à compter de cette date qui considère que lorsque le débiteur libère le capital au-delà du délai de douze mois alors que le jugement ou la convention homologuée par le juge prévoyait que le versement devait intervenir intégralement dans un délai de douze mois, la déduction n'est pas possible.

Ici les versements ont été réalisés avant cette date (doctrine plus souple alors, qui admettait la déduction en pareil cas sauf si les services établissent que les parties n’exécutent pas la décision du juge ou la convention homologuée dans les termes prévus aux seules fins d’en retirer le bénéfice d’un régime fiscal favorable), mais la cour refuse tout de même la déduction, considérant que les anciennes dispositions ne sauraient être regardées comme une interprétation formellement admise du texte fiscal.