Exonération d'impôt sur le revenu d'une indemnité transactionnelle versée lors d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

Jurisprudence
Fiscalité Contrôle fiscal

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Contexte de l'affaire

CE 5 juillet 2018 n°401157

En vertu des dispositions de l'article 80 duodecies du CGI, les indemnités de licenciement et les indemnités transactionnelles sont exonérées d'impôt sur le revenu dans la limite de l'un des plafonds suivants :

  • L’indemnité prévue par la convention collective

  • La moitié de l’indemnité perçue,

  • Deux fois la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile.

Néanmoins, l'indemnité accordée au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse est intégralement exonérée.

La constitutionnalité de cet article a été assortie par le Conseil constitutionnel, d'une réserve d'interprétation (CE 20 septembre 2013 QPC 2013-340) selon laquelle ces dispositions ne sauraient, sans instituer une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi, conduire à ce que le bénéfice de l'exonération varie selon que l'indemnité a été allouée en vertu d'un jugement, d'une sentence arbitrale ou d'une transaction. Il s'ensuit qu'en cas d'indemnité allouée en vertu d'une transaction, l'administration et, lorsqu'il est saisi, le juge de l'impôt doivent rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction. 

En l'espèce, un contribuable avait perçu en 1999 une indemnité transactionnelle de plus d'1,3 million d'euros. Suite à un contrôle fiscal, l'administration imposa une fraction de celle-ci, excédant le montant prévu par la convention collective (un autre régime d'exonération s'appliquait alors)

La Cour administrative d'appel jugea que le requérant ne pouvait bénéficier de l'exonération totale relative aux indemnités accordées au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En effet, il lui incombait d'apporter la preuve que la somme versée à la suite de la transaction conclue correspondait à de telles indemnités.

Le Conseil d'Etat casse l'arrêt de la Cour administrative d'appel. En effet, pour lui, la détermination par le juge de la nature de l'indemnité se fait fait au vu de l'instruction, compte tenu des éléments fournis par les parties et de mesures d'instruction.

Extraits de l'arrêt

4. Il résulte de la réserve d'interprétation dont la décision n° 2013-340 QPC du 20 septembre 2013 du Conseil constitutionnel a assorti la déclaration de conformité à la Constitution du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts que ces dispositions, qui définissent les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail bénéficiant, en raison de leur nature, d'une exonération totale ou partielle d'impôt sur le revenu, ne sauraient, sans instituer une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi, conduire à ce que le bénéfice de l'exonération varie selon que l'indemnité a été allouée en vertu d'un jugement, d'une sentence arbitrale ou d'une transaction. Il s'ensuit qu'en cas d'indemnité allouée en vertu d'une transaction, l'administration et, lorsqu'il est saisi, le juge de l'impôt doivent rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction. 

5. A cet égard, les sommes perçues par un salarié en exécution d'une transaction conclue avec son employeur ne sont susceptibles d'être regardées comme des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mentionnées à l'article L. 122-14-4 du code du travail, devenu l'article L. 1235-3 du même code, que s'il résulte de l'instruction que la rupture des relations de travail est assimilable à un tel licenciement. Dans ce cas, les indemnités accordées au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont exonérées. La détermination par le juge de la nature des indemnités se fait au vu de l'instruction. 

6. Par suite, en jugeant que M. A...ne pouvait bénéficier de l'exonération réservée par les dispositions précitées de l'article 80 duodecies du code général des impôts aux indemnités de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse mentionnées à l'article L. 122-14-4 du code du travail, au motif qu'il lui incombait d'apporter la preuve que la somme versée à la suite de la transaction conclue avec la société X correspondait à de telles indemnités, alors qu'il incombait à la cour de se prononcer au vu de l'instruction, compte tenu des éléments fournis par les parties et, le cas échéant, de mesures d'instruction, la cour a commis une erreur de droit. 

Cour de cassation du , arrêt n°401157

Commentaire de LégiFiscal

Le Conseil d'Etat rappelle le caractère inquisitorial de la procédure administrative. Ainsi, il appartient au juge de l'impôt de diriger l'instruction, afin de prendre en considération le déséquilibre existant entre le contribuable et l'administration.