Contexte de l'affaire
CE 4 mai 2018 n°417475
Les produits destinés à l'alimentation humaine relèvent du taux réduit de TVA (viandes, farine, poisson, boissons non alcoolisées...).
En revanche, on applique le taux normal pour les boissons alcoolisées ou certains autres produits (margarine, confiseries, chocolat...).
Selon le paragraphe 180 des commentaires administratifs BOI-TVA-LIQ-20-10, l'ensemble des boissons (à emporter ou à consommer sur place) dont le titre alcoométrique volumique est égal ou supérieur à 1,2 % vol. ou à 0,5 % vol. pour les bières relève du taux normal.
En l'espèce, la société requérante demanda l'annulation pour excès de pouvoir des mots " ou à 0,5 % vol. pour les bières " figurant dans ce paragraphe. En effet, elle fabriquait des bières "sans alcool" dont le titrage était compris entre 0,5 et 1,2% et soumises au taux normal, et les dispositions attaquées entraînent une différence de traitement entre les bières et les autres boissons alcoolisées. Le principe d'égalité devant l'impôt est donc méconnu.
Le Conseil d'Etat rejette cette demande, au motif que ces commentaires n'ajoutent rien à la loi s'agissant des bières. En effet, selon l'article L.3321-1 du Code de la santé publique ne constituent des "boissons sans alcool" en cas de titrage inférieur à 1,2% que les seuls jus de fruits ou de légume non fermentés ou ne comportant pas, à la suite d'un début de fermentation, de traces d'alcool.
Extraits de l'arrêt
4. En premier lieu, le paragraphe 3 de l'article 98 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée prévoit qu'" en appliquant les taux réduits prévus au paragraphe 1 aux catégories qui se réfèrent à des biens, les États membres peuvent recourir à la nomenclature combinée pour délimiter avec précision la catégorie concernée ". Le chapitre 22 de la nomenclature combinée annexée au règlement du Conseil du 23 juillet 1987 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, relatif aux boissons, liquides alcooliques et vinaigres, précise qu'au sens du code n° 2202, qui comprend les boissons non alcooliques, de telles boissons sont celles dont le titre alcoométrique volumique n'excède pas 0,5 %, alors que les boissons alcooliques sont classées selon le cas dans les codes n°s 2203 à 2206 ou dans le code n° 2208. Il en résulte que doivent, en l'absence de définition spécifique donnée par la loi fiscale des boissons non alcooliques, être regardées comme telles, au sens des dispositions du 1° de l'article 278-0 bis du code général des impôts, les boissons dont le titre alcoométrique volumique n'excède pas 0,5 %. Ce taux alcoométrique volumique s'applique, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à l'ensemble des boissons non alcooliques, sans qu'il y ait lieu de se référer aux catégories de boissons retenues en matière de droits d'accises sur les alcools. Ainsi, en indiquant que le taux normal de taxe sur la valeur ajoutée s'applique aux bières dont le titre alcoométrique volumique est égal ou supérieur à 0,5 % vol, les commentaires attaqués se bornent à réitérer, sans en méconnaître la portée ni y ajouter, les dispositions législatives qu'ils ont pour objet d'éclairer. La circonstance que ces commentaires, dans leur version antérieure, publiée le 12 septembre 2012, se référaient à la définition des boissons alcooliques résultant des quatre derniers groupes alors mentionnés à l'article L. 3321-1 du code de la santé publique, est sans incidence sur la légalité de l'interprétation résultant de la modification de ces commentaires intervenue le 19 septembre 2014, alors au demeurant que l'article L. 3321-1 du code de la santé publique, qui est relatif à la réglementation de la fabrication, de la mise en vente et de la consommation des boissons, classe la bière, quel que soit son titre alcoométrique volumique, dans la catégorie des " boissons fermentées non distillées ", au même titre que notamment les vins, cidres, poirés et hydromels, soit une catégorie de boissons alcooliques, et ne saurait, dès lors, en tout état de cause, être utilement invoqué par la société X pour soutenir que les bières dont le titre alcoométrique volumique est inférieur à 1,2 % devraient être, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, considérées comme des boissons non alcooliques.
5. En second lieu, d'une part, dès lors que les commentaires contestés ne donnent pas une interprétation erronée de la loi fiscale en ce qui concerne le taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux bières, la société requérante ne peut utilement se prévaloir, à l'appui de sa demande tendant à l'annulation des mots " ou à 0,5% vol. pour les bières ", de ce que ces mêmes commentaires méconnaîtraient le principe d'égalité. D'autre part, la loi prévoyant l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée à toutes les boissons non alcooliques telles que définies au point 4 ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de neutralité du système commun de taxe sur la valeur ajoutée ne peut qu'être écarté.
Commentaire de LégiFiscal
La différence de traitement entre les bières et les autres boissons alcoolisées pouvait sembler contraire au principe d'égalité devant l'impôt. Le Conseil d'Etat en a décidé autrement.
Cette décision va intéresser les entreprises fabriquant des bières à faible taux d'alcoolémie.