Report des déficits et changement d'activité d'une société

Jurisprudence
Fiscalité Impôt sur les sociétés

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Contexte de l'affaire

CE 26 juillet 2018 n°404078

Le déficit constaté par une société soumise à l'IS peut être imputé sur ses bénéfices futurs, sans limitation de temps. On parle alors de report en avant des déficits (par opposition au report en arrière, ou carry back).



En outre, selon l'article 221 du CGI, dans sa rédaction antérieure, le changement de l'objet social ou de l'activité réelle d'une société emporte cessation d'entreprise, entraînant la perte du droit au report des déficits.

De ce fait, la mise en oeuvre du droit au report déficitaire est subordonnée notamment à la condition qu'une société n'ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu'elle n'est plus, en réalité, la même.



En l'espèce, une société exerçait une activité d'exploitation de fonds de commerce d'articles d'habillement et de rideaux et créa entre 2003 et 2008, 6 filiales exploitant des fonds de commerce. Au cours de l'exercice clos en 2008, elle procéda à la fermeture du dernier fond qu'elle exploitait directement, puis se consacra exclusivement à son activité de holding.  

L'administration remit en cause l'imputation sur le bénéfice des exercices 2009 et 2010 d'une partie du déficit né à la clôture de l'exercice 2008, au motif que la cessation par la société, en 2008, de l'exercice de son activité de commerce devait être regardée comme une cessation d'entreprise.



Cette position est infirmée par le Conseil d'Etat. Celui-ci relève que si l'activité initiale de la société requérante était exclusivement, lors de sa création, une activité de commerce, elle avait exercé, à partir de 2003, une double activité de commerce et de holding. Le déficit reportable litigieux était né au cours de l'exercice clos en 2008, au cours duquel l'activité de holding représentait déjà une part non marginale de l'activité totale. 

Extraits de l'arrêt

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour, pour caractériser la cessation d'activité de la société au cours de l'exercice clos en 2008, a relevé que l'activité initiale de la société Vêtements Fade était exclusivement, lors de sa création en 1975, une activité de commerce, puis que la société avait exercé, à partir de 2003, une double activité de commerce et de holding, en développant progressivement six filiales, et enfin qu'elle avait fermé le dernier fonds de commerce qu'elle exploitait directement en 2008. En se fondant ainsi, pour juger que le changement d'activité de la société était constitutif d'une cessation d'entreprise au sens du 5 de l'article 221 du code général des impôts, sur l'activité exercée depuis sa création, alors que le déficit reportable en litige était né au cours de l'exercice clos en 2008, au cours duquel l'activité de holding, seule poursuivie en 2009, représentait déjà une part non marginale de son activité totale, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, son arrêt doit être annulé.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Il résulte de ce qui est dit au point 3 ci-dessus que la société X, aux droits de laquelle vient la société Y, n'avait pas subi dans son activité, entre les exercices clos en 2008 et en 2009, de transformations telles qu'elle n'était plus, en réalité, la même, au sens du 5 de l'article 221 du code général des impôts. Par suite, elle était fondée à mettre en oeuvre son droit au report, sur l'exercice clos en 2009, du déficit constaté au terme de l'exercice clos en 2008. 

Cour de cassation du , arrêt n°404078

Commentaire de LégiFiscal

Il convient de regarder l'évolution de l'activité de la société dans le temps afin de déterminer s'il y a cessation ou changement d'activité.

Ici, une circonstance doit être relevée : le déficit a été constaté lorsque l'activité de holding était prépondérante. La solution aurait été certainement différente si le déficit avait été rattaché à une période où l'activité de vente était prépondérante.