Contexte de l'affaire
C.consti 30 novembre 2018 n°2018-748 QPC
Les titres dont la possession durable est estimée utile à l'activité de l'entreprise, notamment parce qu'elle permet d'exercer une influence sur la société émettrice ou en assurer le contrôle, constituent des titres de participation.
En vertu des dispositions de l'article 209-IX du CGI, les charges financières afférentes à l'acquisition des titres de participation sont rapportées au bénéfice de l'exercice lorsqu'il n'est pas possible de démontrer par tous moyens que la société détentrice des titres, sa société mère ou l’une de ses sociétés sœurs, à condition qu’elles soient établies en France, exercent le pouvoir de décision sur les titres.
Pour la société requérante, ces dispositions sont contraires au principe d'égalité devant les charges publiques en réservant la déduction des charges financières afférentes à l'acquisition de titres de participation aux cas dans lesquels les pouvoirs de décision et de contrôle sur la société acquise sont exercés par la société détentrice des titres, sa société mère ou une de ses sociétés sœurs établies en France, à l'exclusion des autres sociétés du même groupe même lorsqu'elles sont établies en France.
Il en résulterait une différence de traitement injustifié.
En outre, le législateur aurait institué une présomption irréfragable de fraude fiscale.
Cette question de constitutionnalité fut jugée sérieuse par le Conseil d'Etat, qui la renvoya devant le Conseil constitutionnel.
Celui-ci considère que les dispositions attaquées sont conformes à la Constitution, en assortissant sa décision d'une réserve d'interprétation. En effet, elles ne sauraient, sans instaurer une différence de traitement sans rapport avec l’objet de la loi, interdire la déduction des charges financières afférentes à l’acquisition de titres de participation lorsqu’il est démontré que le pouvoir de décision sur ces titres et, le cas échéant, le pouvoir de contrôle effectif sur la société acquise sont exercés par des sociétés établies en France autres que les sociétés mère ou sœur de la société détentrice des titres et appartenant au même groupe que cette dernière.
Extraits de l'arrêt
Il ressort des travaux préparatoires que, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu faire obstacle à une pratique d'optimisation fiscale consistant, pour une société établie à l'étranger, à rattacher des charges financières au résultat d'une société de son groupe établie en France afin de bénéficier du régime français de déduction de ces charges alors que les pouvoirs de décision et de contrôle sur la société acquise sont exercés à l'étranger. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général.
Les dispositions contestées ne sauraient, toutefois, sans instaurer une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi, interdire la déduction des charges financières afférentes à l'acquisition de titres de participation lorsqu'il est démontré que le pouvoir de décision sur ces titres et, le cas échéant, le pouvoir de contrôle effectif sur la société acquise sont exercés par des sociétés établies en France autres que les sociétés mère ou sœur de la société détentrice des titres et appartenant au même groupe que cette dernière.
En second lieu, compte tenu de l'objectif poursuivi par le législateur de faire obstacle à une pratique d'optimisation fiscale, les dispositions contestées ne peuvent être regardées comme instituant une présomption de fraude ou d'évasion fiscales. Sous la réserve énoncée au paragraphe 8, le législateur a retenu des critères objectifs et rationnels en fonction du but poursuivi.
Il résulte de tout ce qui précède que, sous la réserve énoncée au paragraphe 8, le 1 de du paragraphe IX de l'article 209 du code général des impôts ne méconnaît pas les principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques. Ces dispositions, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent, sous cette même réserve, être déclarées conformes à la Constitution.
Commentaire de LégiFiscal
Le Conseil constitutionnel rappelle que le législateur peut prendre des dispositions dérogatoires pour lutter contre la fraude fiscale.