L’imposition des intérêts moratoires relatifs à des impôts déductibles

Jurisprudence
Bénéfice imposable

Publié le
Télécharger en PDF

Contexte de l'affaire

Le Conseil d’État a rendu le 8 janvier 2019 (décision n°406722) une décision relative aux modalités d’imposition des intérêts moratoires perçus de l’administration fiscale.

Il résulte de l’article 39 du CGI que les amendes, pénalités, majorations et intérêts de retard ne sont pas déductibles du résultat imposable. En revanche, les rappels d’impôt sont déductibles si l’impôt lui-même est déductible, comme c’est le cas par exemple pour la CVAE et la CFE. Parallèlement, les dégrèvements d’impôt obtenus sont imposables seulement s’ils se rapportent à des impôts admis dans les charges déductibles. Il en va de même pour les intérêts moratoires perçus.

Dans le cadre de l’affaire traitée par le Conseil d’État, une société a fait l’objet d’un redressement relatif à la taxe sur les conventions d’assurance, un impôt normalement déductible, contrairement aux intérêts de retard qui les accompagnent. La société a bénéficié d’un dégrèvement total et d’intérêts moratoires. Le dégrèvement est imposable puisque la taxe est déductible. En revanche, la société a déduit extracomptablement les intérêts moratoires.

La Cour d’appel administrative de Versailles a donné raison à la société (arrêt n°15VE02777 du 15 novembre 2016). Elle a considéré que les intérêts moratoires n’étaient pas imposables dans la mesure où les intérêts de retard subis à l’origine n’étaient pas déductibles.

Le Conseil d’État a annulé cette décision. Il rappelle que les intérêts moratoires ne sont que l’accessoire du dégrèvement et suivent ainsi le même régime fiscal que ce dernier. Ainsi, lorsque le dégrèvement est imposable, les intérêts moratoires le sont aussi.  

Extrait décision n°406722 du Conseil d'Etat

  1. […] Il résulte de ces dispositions que les intérêts moratoires assis sur des impositions dégrevées, qui ont pour seul objet de tenir compte de la durée pendant laquelle le contribuable a été privé des sommes correspondantes et dont ils ne sont ainsi que l'accessoire, doivent être soumis au même régime fiscal que ces dégrèvements. 
  2. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 ci-dessus que lorsque des impositions restituées à une entreprise sont incluses dans son résultat imposable, les intérêts moratoires qui lui sont versés en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales doivent également être soumis à l'impôt. Par suite, la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit en jugeant que les intérêts moratoires ne pouvaient donner lieu à taxation au motif qu'à la différence des impositions auxquelles ils se rapportent, ils n'avaient pas fait l'objet d'une déduction préalable des résultats.

Source : Décision n°406722 du Conseil d’Etat

Cour de cassation du

Commentaire de LégiFiscal

Le Conseil d'Etat réaffirme un principe, les intérêts moratoires suivent le régime fiscal du dégrèvement. Il n'y a ainsi pas de parallélisme entre la non-déduction automatique des intérêts de retard payés par une entreprise et les intérêts moratoires perçus qui peuvent être normalement imposables si l'impôt auquel ils se rapportent est déductible.