Contexte de l'affaire
Le Conseil d’État vient d’apporter un nouvel éclairage sur les conditions de l’acceptation d’un recours gracieux sur les sommes dues au titre de l’impôt sur le revenu.
Selon l’article 247 du livre de procédure fiscale (LPF), l’administration fiscale peut accorder au contribuable sur sa demande une remise totale ou partielle d’impôts directs tels l’impôt sur le revenu et les impôts locaux. Deux conditions doivent être réunies :
- Le contribuable doit être dans l’impossibilité de payer ces impôts par suite de gêne ou d’indigence
- Les impositions, amendes ou majorations doivent être définitives.
L’administration peut rejeter ces demandes si l’impossibilité de payer est imputable à l’organisation volontaire du contribuable de son insolvabilité.
Dans l’affaire concernée, l’administration fiscale puis ensuite le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ont refusé d’accorder un recours gracieux à des contribuables pourtant surendettés et bénéficiaires du RSA et de la CMU et sans patrimoine. Ils ont estimé que ces derniers avaient organisé leur insolvabilité dans la mesure où ils percevaient des revenus annuels de 35.000 € environ et qu’ils avaient choisi d’affecter leurs ressources en priorité au remboursement de crédit à la consommation et au règlement d’honoraires d’avocat plutôt qu’au paiement de leur dette fiscale (cotisation d’IR supplémentaire).
Le Conseil d’État a annulé ce jugement. Ils ont estimé que la situation de gêne ou d'indigence ne pouvait être analysée, du seul fait du choix des contribuables d'affecter leurs ressources au remboursement de dettes non fiscales. Le Conseil d’État met ainsi en évidence qu’après paiement des charges, leur revenu disponible s’élevait à 36 € par mois.
Extrait décision du Conseil d’Etat n°419907 du 7 mars 2019
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En second lieu, il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté qu'à la date de la décision litigieuse, M. et Mme E..., dont la dette fiscale au titre de l'impôt sur le revenu s'élevait, à l'exclusion des majorations relatives aux années 2008 et 2009, compte tenu des règlements partiels effectués, à environ 15 000 euros, percevaient un revenu de solidarité active de 621 euros par mois ainsi qu'une allocation logement de 367 euros mensuels et supportaient un loyer de 952 euros par mois, le revenu demeurant disponible après paiement de leurs charges s'élevant par suite à 36 euros par mois. Il n'est pas davantage contesté que les intéressés étaient dépourvus de patrimoine. Il en résulte qu'ils se trouvaient, au sens des dispositions précitées du 1° de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales, dans l'impossibilité de payer du fait d'une situation de gêne ou d'indigence qui ne saurait être regardée, du seul fait de leur choix d'affecter leurs ressources au remboursement de dettes non fiscales, comme résultant de l'organisation par eux-mêmes de leur insolvabilité. En outre, et contrairement à ce que soutient le ministre, ces dispositions ne subordonnent pas la faculté qu'elles ouvrent à l'administration d'accorder au contribuable une remise gracieuse, pour ce qui concerne les dettes en principal relatives à des impôts directs, à la condition que les impositions en cause soient devenues définitives. Il résulte de ce qui précède qu'en rejetant la demande de remise gracieuse des époux E...en tant qu'elle portait sur la partie de leur dette fiscale autre que celle mentionnée au point 6, l'administration fiscale a commis une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la décision du 4 septembre 2013 du directeur départemental des finances publiques du Val d'Oise doit être annulée en tant qu'elle concerne les cotisations d'impôt sur le revenu dues au titre des années 2003, 2004, 2008 et 2009 ainsi que les majorations relatives aux années 2003 et 2004.
Source : Décision du Conseil d’Etat n°419907 du 7 mars 2019
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Commentaire de LégiFiscal
La situation de gêne ou d'indigence d'un contribuable demandant un recours gracieux relatif au paiement d'impôt direct ne peut être analysée, du seul fait du choix du contribuable d'affecter ses ressources au remboursement de dettes non fiscales.