Contexte de l'affaire
Les faits
Madame B, était usufruitière d’actions d’une société (SAS A) et par acte sous signature privée déclare, dans l’acte, faire « abandon à la société (SAS B) … » de l’usufruit, (valeur 982.372 €), qu’elle détenait sur la majorité des titres de la SAS A.
Les enfants de Madame B détiennent la quasi-totalité de La SAS B.
Pour l’administration fiscale, l’acte d’abandon est une donation au profit de la SAS B.
Elle lui notifia un redressement avec des intérêts de retard.
Les procédures s’enchainent, et l’affaire est portée en cassation qui constate l’existence d’une donation indirecte taxable à 60 %, compte tenu de l’identité du donataire et des liens avec le donateur.
L’abandon d’usufruit peut constituer une donation indirecte, sous conditions
Il faut constater une acceptation.
Elle peut s’exprimer d’une manière tacite, résultant d’un comportement du nu-propriétaire.
Pour la Cour de cassation, la preuve résultait du fait que les nus-propriétaires font figurer ces titres en pleine propriété dans leur déclaration d’impôt de solidarité sur la fortune et avaient encaissé les dividendes produits par ces titres.
Il faut constater un dépouillement.
L’usufruit possède à la fois, une valeur, et matérialise un pouvoir de décision dans la gestion de la société. S’en séparer constitue un dépouillement.
Il faut constater l’intention libérale.
Cet abandon s’inscrivait dans une opération plus globale de transmission des deux sociétés.
L’opération favorable aux enfants détenteurs quasi exclusifs de la société est révélatrice d’une donation au profit des enfants.
Démarche des plus logique que de vouloir gratifier ses enfants, plutôt qu’une société, même si une personne morale dispose d’un intérêt propre à recevoir une donation
Pour la Cour de cassation, la donation est consentie à la seule société, bénéficiaire.
Et la Cour de préciser que l’usufruitier « entendait gratifier la société en accroissant la valeur de ses actions et ses biens dès lors que cette dernière était la bénéficiaire de la donation intervenue en sa faveur et non les enfants de Mme ».
Lire aussi : France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 avril 2019, 17-19733
Cass. Com., 10 avr. 2019, pourvoi n°17-19733 : LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Attendu, selon l'arrêt...
Commentaire de LégiFiscal
Selon la Cour, la volonté de l’usufruitière est de « gratifier la société en accroissant la valeur de ses actions et ses biens » et de prolonger « si cet abandon (…) profitait aux associés en leur permettant de céder leurs actions, la société l’avait immédiatement accepté et avait perçu les dividendes lui revenant dès leur mise en distribution »
L’arrêt met en exergue la pratique de telle donation, et incite à la prudence dans la rédaction d’acte d’abandon d’usufruit au profit d’une personne morale.
L’existence d’une personne morale n’interdit nullement de reconnaître l’existence d’une donation indirecte au profit des enfants associés, voire même l’existence d’une donation déguisée.
D’où la nécessité de démontrer que l’acte avait été passé pour les enfants et accepté par eux, en leur qualité de descendants.