Donation avant cession et quasi-usufruit : abus de droit fiscal ?

Jurisprudence
Fiscalité Plus-values mobilières Nouveauté

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Contexte de l'affaire

L’opération de donation avant cession permet de neutraliser la taxation des plus-values, puisque celle-ci est purgée par la donation.

Si la cession intervient peu après la donation l’espace-temps ne permet pas de générer une plus-value.

M et Mme B font une donation le 1er août 2008 à leur fille de la pleine propriété de 296 actions qu’ils détenaient pour une valeur de 122 100 € et de la nue-propriété de 1 184 autres actions de cette même société pour une valeur de 146 520 €.

Deux jours plus tard, l’ensemble des actions est cédé à la société holding AC pour un montant de 122 100 € (les 296 actions en pleine propriété) et pour un montant de 488 400 € (les 1 184 actions démembrées).

Le 10 août 2008, les parents concluent avec leur fille une convention de quasi-usufruit aux « termes de laquelle ils disposeront de la somme de 488 400 € en bon père de famille », à charge pour eux de restituer au terme de l’usufruit une somme de même montant et ils déclarent verser la totalité de cette somme à titre de prime sur un contrat d’assurance-vie (dans le cadre d’un remploi). Ils récupéraient ainsi la totalité du prix de vente des titres donnés en nue-propriété, et en pleine propriété.

M et Mme B ont déclaré une plus-value imposable d’un montant de 325 516 € au titre de la cession des actions démembrées et aucune plus-value au titre de la cession des 296 actions.

« L’administration fiscale a estimé, en mettant en œuvre les dispositions de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, que, M. et Mme B s’étant réapproprié la totalité du prix de cession des titres donnés en pleine propriété à leur fille ainsi que la totalité du prix de cession des actions dont la propriété a été démembrée, l’acte de donation du 1er août 2008 était dépourvu d’intention libérale. L’administration a donc imposé entre les mains de M. et Mme B la plus-value résultant de la cession des 1 480 actions de la société AT à hauteur de 591 176 €. »

L’administration fiscale leur a notifié des rectifications résultant de la taxation de la plus-value résultant de la cession.

Après procédure contradictoire, saisine du comité de l’abus de droit, leur réclamation préalable est rejetée.

M et Mme B sollicitent le TA (Tribunal Administratif) de Nantes pour la décharge de ces impositions. Le tribunal rejette leur demande.

Ils relèvent appel

La Cour rejette l’appel des époux B et confirme l’imposition dont ils ont fait l’objet.

Cour de cassation du , arrêt n°Arrêt de la CAA de Nantes du 2 juillet 2020, n° 18NT01415

Commentaire de LégiFiscal

Les clauses de la donation sont figées à la date de la cession et ne sont donc pas susceptibles d’être modifiées après cette date.

En l’espèce, la convention de quasi-usufruit a été conclue postérieurement à l’acte de donation.

Le prix de cession des titres démembrés n’avait fait l’objet d’aucun remploi.

« Un contribuable qui avait donné la nue-propriété et la pleine propriété de droits sociaux commettait un abus de droit lorsqu’il récupérait le prix de vente des titres donnés en pleine propriété et en nue-propriété. »

L’absence d’intention libérale des parents est démontrée par l’appropriation en totalité du produit de la cession des titres.

« Par suite, c’est à bon droit que l’administration fiscale a estimé que la donation réalisée le 1er août 2008 de titres en pleine propriété présentait un caractère fictif et l’a écartée sur le fondement de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales. »

Arrêt de la CAA de Nantes du 2 juillet 2020, n° 18NT01415