Contexte de l'affaire
Le trust est un outil qui dépasse la notion du simple démembrement.
W.I. résidente américaine, a constitué un trust révocable (en 1964) dans lequel elle a placé des avoirs financiers, remis à un « trustee » aux fins de gestion.
Cet acte prévoyait qu’à son décès :
- Seuls les revenus du trust reviendraient à ses trois enfants
- Et qu’au décès de sa fille, U. G. les biens placés dans le trust devraient être répartis entre les enfants de cette dernière, à condition qu’ils aient atteint l’âge de 35 ans.
W.I. est décédée aux Etats-Unis sans avoir révoqué le trust.
Puis U. G. décède en France.
Ses trois enfants lui succèdent, tous âgés de plus de 35 ans, dont M. C. G.
Par réclamation M. G., a demandé à l’administration fiscale le remboursement des droits de succession, estimant non imposables les avoirs placés dans le trust.
Selon elle, U. G. n’en avait détenu que l’usufruit, la nue-propriété appartenant à ses héritiers dès le décès de W.I.
La réclamation rejetée, M. G. a assigné la direction générale des finances publiques.
Les enfants prétendent avoir recueilli la nue-propriété des biens au décès de leur grand-mère (donc sans droit de succession à l’époque concernant les trusts). Ainsi au décès de leur mère ils avaient recueilli son usufruit en franchise de droits.
Pour la Cour
Vu l’article 750 ter du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 :
« Sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit : les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l’article 4 B et ceux reçus par l’héritier, le donataire ou le légataire qui a son domicile fiscal en France au sens de cet article. »
La Cour :
Casse et annule, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 12 janvier 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;
Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris ;
Arrêt n°673 Cass. com., 18 novembre 2020, n° 18-14.242.
Commentaire de LégiFiscal
Le fait générateur des droits de mutation à titre gratuit est constitué par le transfert de propriété, qui en l’occurrence ici pour des biens placés dans un trust, s’opère par l’effet de la distribution de l’actif du trust au bénéficiaire final, (jour de sa clôture), laquelle peut être postérieure au décès du constituant.
L’arrêt, après « avoir relevé qu’il résultait des statuts du trust que M. G. disposait, sous condition, d’une part de ces actifs dès lors que cette disposition ne pouvait être révoquée après le décès de W. I., en déduit que le droit de M. G. sur ces actifs était certain, qu’il est donc devenu nu-propriétaire de cette part au décès de W. I. et que le décès subséquent d’U. G. n’a pas entraîné de nouveau transfert de propriété mais seulement l’extinction de l’usufruit sur ces actifs, opération non taxée en France. »
Le trust prévoyait sa clôture au décès d’U. G., et non à celui de sa constituante.
La Cour de cassation a considéré que les petits-enfants n’avaient pas recueilli la nue-propriété des biens mis en trust au décès de leur grand-mère, mais que c’est la dissolution du trust qui a entraîné la mutation à titre gratuit du patrimoine de la grand-mère.
C’est cette dernière opération qui constitue le fait générateur de la taxation.
Le droit ayant évolué, le droit applicable avant la réforme de loi du 29 juillet 2011 organisant la taxation des biens mis en trust, est modifié depuis en son article 750 ter alinéa 3 entré en vigueur dans sa nouvelle version.
Donc « en cas de maintien du trust au décès du constituant, les bénéficiaires deviennent « réputés constituants » et les droits sont dus à cette date compte tenu du lien de parenté entre les bénéficiaires et le constituant initial ».