Contexte de l'affaire
En date du 16 mars 2007, par un acte authentique de donation-partage M. et Mme A. ont cédé à leurs deux enfants la nue-propriété de 20 000 actions de la société V, dont ils ont conservé l'usufruit.
Dans le cadre d'une réduction de son capital, le 6 janvier 2009, la société procède, au rachat de ces actions, l'usufruit et la nue-propriété étant cédés simultanément.
Faisant suite à un contrôle sur pièces, l’administration fiscale notifie à M. et Mme A. des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, et contributions sociales.
Pour l’administration fiscale, la plus-value afférente à la cession des 20 000 titres dont ils détenaient l’usufruit, était intégralement imposable entre leurs mains et non, entre les mains des nus-propriétaires comme M. et Mme le pensaient.
M. et Mme A. demandent au TA (Tribunal Administratif) de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur le revenu et des contributions sociales.
Par un jugement du 7 juin 2016, le TA rejette leur demande.
Par un arrêt du 29 janvier 2019, la CAA (Cour Administrative d’Appel) de Versailles décharge M. et Mme A de l’imposition en litige et annule le jugement du tribunal.
Le ministre de l'Economie des finances et de la relance se pourvoit en cassation.
Au regard du 1 du I de l'article 150-0 A du CGI (Code Général des Impôts) : " (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, (...) sont soumis à l'impôt sur le revenu (...).
L'imposition de la plus-value, lorsque l'usufruitier et le nu-propriétaire de parts sociales (en propriété démembrée) procèdent ensemble à la cession de ces parts sociales, se répartit entre l'usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits.
Si les parties ont décidé, par des clauses contractuelles que « le droit d'usufruit serait, à la suite de la cession reporté sur le prix issu de celle-ci, la plus-value est alors intégralement imposée entre les mains de l'usufruitier. »
Si les parties ont décidé, que « le prix de cession sera nécessairement remployé dans l'acquisition d'autres titres dont les revenus reviennent à l'usufruitier, la plus-value réalisée n'est imposable qu'au nom du nu-propriétaire. »
Lorsque l'usufruitier conserve la faculté de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l'usufruit, cela rend l'usufruitier intégralement redevable de l'imposition.
L’acte de donation partage faisait interdiction aux nus-propriétaires d'aliéner ou de nantir les titres sans l'accord des usufruitiers, (…) et donnait mandat exclusif à ces derniers pour gérer les fonds issus de la cession des titres qui serait décidée avec leur accord, en l'absence de remploi pour acquérir de nouveaux titres.
L'acte stipulait qu'en cas d'aliénation des titres, les nus-propriétaires s'interdisaient (sauf accord , des usufruitiers) , à demander le partage en toute propriété du prix représentatif de ceux-ci.
« Il ressortait donc de l'acte à l'origine du démembrement des titres que le droit d'usufruit était, en cas de cession, reporté sur le prix issu de celle-ci. »
En outre, il résulte que le remploi du prix de vente des titres n’est qu'une simple faculté à la main des seuls usufruitiers.
L’usufruitier « gardant la possibilité de reporter son droit d'usufruit sur le prix issu de la cession des actions de la société V, il résulte que M. et Mme A. devaient, en leur qualité d'usufruitiers, être regardés comme redevables de l'intégralité de l'imposition assise, en application de l'article 150-0 A du code général des impôts, sur la plus-value résultant de la cession de ces actions. »
Décide :
Article 1er : L'arrêt du 29 janvier 2019 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : La requête de M. et Mme A. présentée devant la cour administrative d'appel de Versailles est rejetée.
Commentaire de LégiFiscal
Au motif que l'acte de donation partage prévoyait le remploi du produit de la vente des titres avec report des droits des usufruitiers sur les biens nouvellement acquis, dans un premier temps, la Cour n’a pas recherché si ce remploi était une obligation ou s'il n'était qu'une simple faculté à la main des seuls usufruitiers.
Lorsque l'usufruitier conserve la faculté de remployer ou non le produit de la cession des titres dont il a l'usufruit, cela rend l'usufruitier intégralement redevable de l'imposition.
Nous sommes dans une stipulation dans laquelle la donation-partage comporte une clause de report de l’usufruit en cas de remploi du prix de cession pour l’acquisition d’un autre bien.
Pour le Conseil d’Etat, M. et Mme A doivent, en tant qu’usufruitiers, être regardés comme redevables de l’intégralité de l’imposition.