Contexte de l'affaire
Une société de crédit à la consommation a fait l’objet d’un redressement par l’administration fiscale sur la base d’un rejet de la provision constatée sur ses créances impayées. Le Conseil d’État en a décidé autrement (Conseil d’État, n°433028, 22 avril 2021).
Les faits
À l’issue d’une vérification de comptabilité par l’administration fiscale portant sur les années 2009 et 2010, une société de crédit à la consommation connue par le plus grand nombre sur la place publique, s’est vu redressé et condamné à régler un montant global de 17 millions d’euros d’arriérés d’IS. L’administration fiscale a rejeté la provision enregistrée pour la dépréciation de créances clients impayées.
La législation fiscale admet en déduction les provisions relatives aux créances qualifiées de douteuses ou litigieuses. Cette qualification est déterminée par la mauvaise situation financière du débiteur ou par un litige opposant les deux parties (créancier et débiteur).
Malgré une procédure de relance détaillée, l’administration fiscale justifie le redressement par la trop rapide qualification de la créance en « douteuse ». En effet, un rejet de prélèvement de moins de 90 jours déclenche la constitution d’une provision sans que la société n’analyse concrètement la capacité de ses clients à rembourser leur dette.
La décision du Conseil d’État
La société a porté l’affaire devant le tribunal administratif de Montreuil puis en seconde juridiction devant la cour administrative d’appel (CAA) de Versailles. Cette dernière confirme les redressements. Elle estime que la probabilité du risque ne peut être uniquement la résultante d’un non-paiement à échéance, ni l’échec des relances, ni l’impossibilité de compenser l'impayé par un prélèvement sur les comptes bancaires des clients. La société se pourvoit en cassation devient le Conseil d’État.
Dans un jugement rendu le 22 avril 2021, le Conseil d’État annule l’arrêt de la CAA de Versailles. La haute juridiction, s’appuyant sur la nature particulière de l’activité exercée, estime que la procédure établie par l’entreprise permet de déterminer de manière fiable le degré de risque d’impayé de la créance. Elle renvoie l’affaire devant la CAA de Versailles et condamne l’État à verser 3.000 € au requérant.
Commentaire de LégiFiscal
Afin de justifier la déductibilité fiscale des dépréciations sur créances, celles-ci doivent être étayées d’arguments matériels (procédures, relances téléphoniques, par courrier ou par courriel) justifiant le caractère probable de non-paiement. Lorsque la créance concerne un client d’une société de crédit à la consommation, la nature particulière de l’activité doit être prise en compte et le caractère déductible de la dépréciation doit s’appuyer sur l’analyse du processus d’impayé mis en œuvre.