Contexte de l'affaire
La SCI (Société Civile Immobilière) L. a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, au titre de la période de janvier 2012 à juillet 2015, en matière de BIC (Bénéfices Industriels et Commerciaux) et de TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée).
Faisant suite à ce contrôle, l'administration a estimé que la revente, en mars 2015, de deux terrains à bâtir, acquis le 13 juillet 1978 et le 12 juin 1981, constituait une opération commerciale assujettie à la TVA.
Concomitamment, les revenus déclarés des associés de la SCI L. ont fait l'objet d'un contrôle à l'issue duquel l'administration a remis en cause l'absence de déclaration de la quote-part des bénéfices industriels et commerciaux de la SCI.
L’administration a assujetti en conséquence chacun des associés, dont M. H., à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu.
M et Mme H. relèvent appel du jugement du 20 décembre 2019 rendu par le TA (Tribunal Administratif) de Nîmes, lequel a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015.
Par une requête, et des mémoires complémentaires, M. et Mme H. demandent à la CAA (Cour Administrative d’Appel) :
1°) d'annuler ce jugement du 20 décembre 2019 du tribunal administratif de Nîmes
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des impositions en litige ;
Article 35 du CGI (Code Général des Impôts) : " Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés. (...) ".
L'activité de marchand de biens, en tant qu’activité commerciale est subordonnée à la double condition que : « les opérations d'achat en vue de la revente procèdent d'une intention spéculative et qu'elles présentent un caractère habituel. »
« La condition d’intention spéculative doit être recherchée à la date d’acquisition des immeubles ultérieurement revendus, et non à la date de leur cession. »
Dans ses statuts, la SCI L a pour objet social: " l'acquisition d'un terrain sis à Carpentras, la division de ce terrain en parcelles viabilisées en vue d'effectuer un lotissement, la vente en totalité ou par lots des parcelles ainsi viabilisées, accessoirement la location d'immeubles ou fractions d'immeubles, et généralement toutes opérations mobilières, immobilières et financières se rattachant directement ou indirectement à l'objet social pourvu qu'elles ne modifient en rien le caractère civil de la société ".
La SCI a procédé à l'acquisition de deux terrains à bâtir le 13 juillet 1978 et le 12 juin 1981 en prenant l'engagement de les viabiliser et d'y construire des villas dans un délai de quatre ans.
Par la suite, ses décisions de gestion confirment que la SCI avait entendu valoriser les terrains avant de les revendre.
L'intention spéculative des associés est établie à la date d'acquisition des immeubles ultérieurement revendus et n'est pas remise en cause par la revente des parcelles, intervenue après plus de trente ans de détention.
Quant à la condition d'habitude (I de l'article 35 du CGI), elle s'apprécie en principe en fonction du nombre d'opérations réalisées et de leur fréquence.
La condition d'habitude ne peut être réputée remplie et la vente des terrains réalisée en mars 2015, ne peut être regardée comme une opération commerciale de marchand de biens au sens des dispositions du 1° du I de l'article 35 du CGI.
En l'espèce, par acte notarié de 2004, la SCI L. a vendu, après l'avoir louée d'octobre 2002 à décembre 2003, la parcelle comprenant une maison d'habitation, à la SCI Les Sablières pour un montant de 140 000 euros. Pour autant, une telle transaction est demeurée isolée.
Cette notion doit également être réputée remplie lorsque les associés (par leur rôle ou bénéfices qu’ils tirent des activités de la société) sont des personnes qui se livrent elles-mêmes, de façon habituelle, à des opérations d'achat et de revente en l'état d'immeubles. La SCI étant l'un des instruments d'une activité d'ensemble.
Il ne résulte pas de l'instruction que ces associés se seraient livrés à titre habituel, à de telles opérations.
Enfin, que l'objet social de la SCI L. ait un caractère commercial et que la SCI ait régulièrement souscrit, des déclarations de résultat professionnel annuelles selon le régime du réel normal, ne suffit pas à caractériser cette condition d'habitude.
Décide :
Article 1er : Le jugement n° 1800386 du 20 décembre 2019 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.
Article 2 : M. et Mme H. sont déchargés, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2015.
(…)
Commentaire de LégiFiscal
Avoir la qualité de marchand de biens c’est pour une personne physique ou morale effectuer des actes de commerce qui portent sur « des opérations d’achat en vue de la revente d’immeubles, de manière habituelle, répétitive. »
Ceci s’applique à la fois dans le cadre de la profession principale, mais aussi pour toute personne qui, à titre privé, procède à plusieurs opérations d’achat revente. Cette personne pourrait être considérée comme ayant une activité de marchand de biens.
Selon l’article 35-I du CGI, l’activité de marchand de biens, est subordonnée à la double condition que les opérations d’achat en vue de la revente procèdent d’une intention spéculative et qu’elles présentent un caractère habituel.