SCI : Sommes mises à disposition, considérées comme des revenus distribués et abus de droit

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Contexte de l'affaire

La SCI (Société Civile Immobilière) SLJ a pour objet la gestion de biens immobiliers mis à la disposition de M. A., son principal associé, et de sa famille.

En novembre 2010 et décembre 2011, la société N, dont M. A. est également associé, a consenti à la société SLJ deux prêts d'un montant total de 2 100 0000 €.

La société SLJ s’est servie de cet argent pour rembourser des avances en compte courant que lui avait consenties M. A. pour le financement des travaux de construction et d'entretien de ses biens immobiliers.

S’en suit un contrôle sur pièces des déclarations de revenus souscrites par M. et Mme A.

Pour l’administration fiscale,

La société N. a mis les sommes, à la disposition de son associé, M. A., par l'intermédiaire de la société SLJ.

Elles constituaient des distributions taxables entre les mains de ce dernier sur le fondement du : a de l'article 111 du CGI (Code Général des Impôts).

M.A. et Mme A. ont demandé au TA (Tribunal Administratif) de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1619151 du 17 avril 2019, le TA a rejeté leur demande.

En appel, de Mme A. et de la succession de M. A., la CAA (cour Administrative d'Appel) de Paris a annulé ce jugement et prononcé la décharge des impositions et pénalités en litige.

Le ministre de l’Économie, des finances et de la relance se pourvoit en cassation.


Article 111 du CGI : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes ".

Article L. 64 du LPF (Livre des Procédures Fiscales) : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles ".

Pour la CAA, l'administration avait implicitement mis en œuvre, la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du LPF, sans que les contribuables ne bénéficient des garanties, liées à la procédure.


L’administration, s'est bornée, sans écarter comme ne lui étant pas opposable aucun acte passé par les contribuables, à faire valoir que les sommes versées, devaient être regardées comme ayant été mises à la disposition de M.A. et constituaient, faute de preuve contraire, des revenus distribués taxables entre ses mains.

Le ministre est fondé à soutenir que la CAA de Paris a « inexactement qualifié les faits, en jugeant que l'administration avait implicitement mis en œuvre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales et à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ».


Décide :


Article 1er : L'arrêt du 24 juin 2021 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

(…)

Cour de cassation du , pourvoi n°Arrêt du Conseil d’Etat du 11 février 2022, n° 455794

Commentaire de LégiFiscal

L’administration avait mis en œuvre la présomption de distribution, et le Conseil d’Etat a jugé que l’administration avait implicitement mis en œuvre « les dispositions relatives à l’abus de droit fiscal sans accorder au contribuable redressé les garanties y afférentes. »

Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés (directement ou par personnes ou sociétés interposées) à titre de prêts ou d’acomptes sont considérées comme des revenus distribués.

Il y a présomption de distribution.

C’est aux redevables qu’il appartient, d’apporter la preuve contraire.

Pour la juridiction d’appel, l’administration avait implicitement mis en œuvre les dispositions relatives à l’abus de droit de l’article L64 du LPF sans accorder les garanties y afférentes aux contribuables concernés.

« Cela consiste, pour l’administration, à écarter comme ne lui étant pas opposable un acte de droit privé sans mettre en œuvre la procédure prévue par l’article L 64 du LPF. »

Pour le Conseil d’Etat le ministre était fondée à soutenir que la CAA de Paris avait inexactement qualifié les faits.