Contexte de l'affaire
La Cour de cassation vient de préciser les conditions dans lesquelles l’acheteur des parts d’une société placée ensuite en liquidation judiciaire pouvait agir en justice contre le dirigeant de celle-ci dans la situation où les documents comptables transmis étaient erronés (Cour de cassation, chambre commerciale, 2 février 2022, n°20-17.15).
Les faits
Dans le cadre d’un projet de partenariat, un particulier a personnellement prêté de l’argent à une société et acquis la majorité du capital à travers la société qu’il dirigeait. La société rachetée a ensuite fait l’objet d’une liquidation judiciaire. Le nouvel associé majoritaire et son président reprochent aux dirigeants de la société rachetée une dissimulation frauduleuse de la situation réelle de la société commise avec le concours d’un expert-comptable. Ils les assignent alors en réparation des préjudices subis à savoir la réalisation en pure perte des investissements réalisés sur la base d’informations et de documents comptables inexacts.
La décision de la Cour de cassation
Selon les articles L. 622-20 et L.641-4 du code de commerce, seul le liquidateur a qualité pour agir au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers. Toutefois, la Cour rappelle qu’un actionnaire ou un investisseur peut agir en responsabilité contre le dirigeant de la société débitrice ou son expert-comptable afin d’obtenir réparation du préjudice résultant de la perte de ses apports réalisés sur la foi de la présentation de comptes annuels infidèles en invoquant un préjudice personnel, distinct du préjudice collectif des créanciers.
La Cour d’appel de Paris a estimé que l’action tendait en réalité uniquement à obtenir la seule réparation du préjudice pécuniaire résultant des investissements perdus et que l’associé majoritaire se trouvait à cet égard dans une situation identique à tout créancier ayant apporté son concours à la société sur la base de comptes certifiés et publiés. Recevoir l’action de l’actionnaire majoritaire causerait ainsi une rupture d’égalité entre les créanciers.
La Cour de cassation rejette cette analyse et retient l’existence d’un préjudice personnel causé par l’insincérité des comptes annuels et non un préjudice causé par la simple défaillance de la société. En conséquence, la Cour casse l’arrêt rendu par la Cour d’appel.
Source : Cour de cassation, chambre commerciale, 2 février 2022, n°20-17.15
Commentaire de LégiFiscal
Un dirigeant d’entreprise ayant fourni des documents comptables inexacts à un futur associé sur la base desquels ce dernier a acheté les parts de la société peut faire l’objet d’une action personnelle par cet associé.