Contexte de l'affaire
Par acte authentique reçu avec la participation de M. J.X. notaire, la SCI N-M., représentée par ses deux associés, M. et Mme F., a promis de vendre, au plus tard le 22 décembre 2017 un immeuble au prix de 860 000 euros.
La déclaration de plus-value établie par M. X. à la demande de la SCI mentionne un prix de cession de 460 000 euros.
Les autres 400 000 euros correspondant au montant que les associés souhaitaient réinvestir dans l'acquisition d'une résidence principale en France afin de bénéficier de l'exonération fiscale prévue à l'article 150 U, II, 1 bis, du CGI (Code Général des Impôts).
Lors de la signature de la vente, le notaire des acquéreurs a relevé que cette exonération fiscale n'était pas applicable, car les associés de la SCI n’étaient pas résidents fiscaux en France.
Le montant de la plus-value imposable est calculé sur l'intégralité du prix de cession.
Le 22 décembre 2017, le bien est vendu.
La SCI N-M. a fait assigner le notaire devant le TGI (Tribunal de Grande Instance) de Nanterre afin d'obtenir réparation de la perte de chance d'avoir pu renoncer à la vente qu'elle estime avoir subi du fait de la faute du notaire.
Le tribunal judiciaire de Nanterre a condamné le notaire à payer à la SCI N-M.la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts,
Le notaire a interjeté appel de ce jugement
Le principe du paiement de l'impôt sur la plus-value était connu du promettant.
La SCI N-M. n'a émis aucune réserve sur le principe de ce paiement, ni évoqué l'éventualité d'une exonération fiscale lors de la signature de la promesse de vente, donc la connaissance par le vendeur du montant exacte de la plus-value n'a jamais conditionné la vente.
Obtenir une exonération fiscale a été décidée et portée à la connaissance du notaire quatre mois après la signature de la promesse de vente.
L'exonération est applicable à la fraction du prix de cession défini à l'article 150 VA que le cédant remploie, dans un délai de vingt-quatre mois, à l'acquisition ou la construction d'un logement qu'il affecte, dès son achèvement ou son acquisition si elle est postérieure, à son habitation principale.
Pour l'administration : « Lorsque la cession du logement est réalisée par une société ou un groupement qui relève de l'article 8 du CGI, de l'article 8 bis du CGI et de l'article 8 ter du CGI, l'exonération s'applique aux associés personnes physiques fiscalement domiciliés en France au sens de l'article 4B du CGI au jour de la cession du logement,… »
Le notaire ne s'est pas pleinement acquitté de son obligation d'information et de conseil.
Il n’a pas informé la SCI N-M. dès sa saisine ou, lors de la signature de la promesse, des conséquences fiscales de l'opération, et impôt sur l'intégralité de la plus-value dans la mesure où l'exonération sur la résidence fiscale n'était pas applicable.
La faute du notaire est établie et le jugement, sur ce point, sera confirmé.
Sur le lien de causalité : En signant la promesse de vente, la SCI s'est engagée à payer l'impôt sur la plus-value, étant résidents étrangers, et ce dernier n'a jamais été une condition suspensive de la vente.
La SCI N.M. ne pouvait pas renoncer à vendre selon les termes mêmes de la promesse une fois signée.
Donc il n'y a aucun lien de causalité entre la faute du notaire et le fait d'avoir eu à payer un impôt sur la plus-value sans exonération.
Indépendamment de la faute du notaire, la perte de chance d'avoir pu renoncer à la vente est inexistante. Les vendeurs ne pouvaient pas renoncer à la vente à compter de la signature de la promesse.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
REJETTE les demandes d'indemnisation et de capitalisation des intérêts de la SCI Nicolas Mathieu ;
DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SCI Nicolas Mathieu aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes.
(…)
Commentaire de LégiFiscal
La faute du notaire est établie.
Par ailleurs, pour la Cour les époux F ne peuvent se prévaloir de la perte de chance invoquée
Les vendeurs ne pouvaient pas renoncer à la vente à compter de la signature de la promesse.