Question prioritaire de constitutionalité sur la remise en cause du calcul de la participation aux résultats

Jurisprudence
Conseil constitutionnel

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Contexte de l'affaire

La Cour de cassation s’est récemment prononcée sur la constitutionnalité de l’article L3326-1 selon laquelle les éléments de calcul de la participation aux résultats établis par une attestation d’un commissaire aux comptes ne peuvent être remis en cause (Cour de cassation, 25 octobre 2023, n°23-14147).

La participation aux résultats

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, l’employeur à l’obligation de calculer et de verser une participation aux salariés lorsque la formule légale donne un montant positif. Pour rappel, la réserve spéciale de participation se calcule ainsi :

RSP = ½ (Bénéfice net – 5% capitaux propres) x Salaires / Valeur ajoutée

L’article L3326-1 du Code du travail prévoit que pour la participation, le montant du bénéfice net et des capitaux propres doivent être établis par une attestation de l’inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes. Cette attestation ne peut être remise en cause à l’occasion de litiges.

Par le passé, les actions en justice des syndicats contestant le calcul de la participation en s’appuyant sur des fraudes ou abus de droit ont été déboutées par la Cour de cassation.

Les faits

Dans l’affaire dans laquelle la Cour de cassation a récemment eu à se prononcer, plusieurs filiales d’un groupe multinational ont conclu un accord de participation de groupe régissant la participation des salariés aux résultats de l’entreprise.

La délégation du personnel et plusieurs syndicats estiment que les prix de transfert entre la filiale de droit suisse et les filiales françaises entraînent une réduction arbitraire du bénéfice de ces dernières et par conséquent la baisse de l’assiette de la participation des salariés aux résultats. Ils portent alors le litige devant le tribunal judiciaire afin de faire annuler les attestations du commissaire aux comptes sur le calcul de la réserve spéciale de participation. La Cour d’appel de Versailles juge irrecevable leur action. La délégation du personnel et les syndicats se pourvoient alors en cassation. Ils demandent à la Cour de cassation de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité. Ils estiment que l’impossibilité de remettre en cause l’attestation du commissaire aux comptes sur le bénéfice net, même en cas de fraude, les prive d’une voie de recours.

La décision de la Cour de cassation

Dans sa décision rendue le 25 octobre 2023, la Cour de cassation constate que l’article L3326-1 du Code du travail incriminé n’a pas déjà été déclaré conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel. Elle estime en outre que cette question présente un caractère sérieux. En effet, elle relève que l’attestation a pour seul objet de garantir la concordance entre le montant du bénéfice net et des capitaux propres déclarés à l'administration et celui utilisé par l'entreprise pour le calcul de la réserve spéciale de participation des salariés aux résultats de l'entreprise, en sorte que l'inspecteur des impôts ou le commissaire aux comptes qui établit cette attestation n'exerce pas, dans le cadre de cette mission, un pouvoir de contrôle de la situation de l'entreprise. L’interdiction de la remise en cause de cette attestation pourrait être considérée comme portant une atteinte substantielle au droit à un recours juridictionnel effectif.

Source : Cour de cassation, 25 octobre 2023, n°23-14147

Cour de cassation du

Commentaire de LégiFiscal

L’impossibilité de contester l’attestation d’un commissaire aux comptes ou d’un inspecteur des impôts sur le montant du bénéfice net et celui des capitaux propres pour la détermination de la participation pourrait constituer une atteinte au droit constitutionnel à un recours juridictionnel effectif. La Cour de cassation renvoie en conséquence une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.