SCI et marchand de biens : le nombre d'opérations et la fréquence, même sur une longue période

Jurisprudence
Fiscalité Impôt sur les sociétés

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Contexte de l'affaire

La SCI (Société Civile Immobilière) et forestière C est constituée le 17 mars 1960 ; M. B A est associé gérant. La SCI a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Le service vérificateur a considéré que les ventes de terrains réalisées au cours de la période, constituaient des opérations commerciales soumises à l’impôt sur les sociétés et à la TVA (Taxe sur la Valeur Ajoutée).

L’examen du compte bancaire de la SCI a permis de constater que M. A avait opéré en 2016 un prélèvement net dans la trésorerie de la SCI, à hauteur de 59 222 euros.

Pour l’administration fiscale ce prélèvement est constitutif d’un revenu distribué pour son bénéficiaire.

Donc l’intéressé est assujetti à des cotisations supplémentaire d’impôts sur le revenu et de contributions sociales, en droits et pénalités.

M. A demande au TA (Tribunal Administratif) de prononcer la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 206 du CGI (Code Général des impôts), et champ d’application de l’impôt sur les sociétés : « () les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt () si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 () ».

Article 35 du même code : " I. – Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l’application de l’impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés. 1° bis Personnes qui, à titre habituel, achètent des biens immeubles, en vue d’édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux ; () 3° Personnes qui procèdent à la cession d’un terrain divisé en lots destinés à être construits lorsque le terrain a été acquis à cet effet () ".

Article 109 du CGI : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (…): »

Pour M. A, il ne pouvait pas être assujetti à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales à raison de revenus distribués, dans la mesure où la SCI ne peut être regardée comme étant passible de l’impôt sur les sociétés, dès lors que l’activité de cette dernière ne peut être qualifiée de commerciale.

La condition d’habitude s’apprécie en fonction du nombre d’opérations réalisées et de leur fréquence.

L’intention spéculative, doit être recherchée à la date d’acquisition des immeubles et non à la date de leur cession, (leur revente),

Dans les statuts de la SCI, aucune mention ayant pour objet la division de terrains en lots en vue de leur revente. Si en 2007, une refonte des statuts fait mention d’une division en lots, c’est uniquement en vue de leur attribution aux associés en propriété et en jouissance.

L’acte d’acquisition du 18 mars 1960 mentionne, que la partie du terrain qui n’est pas soumise au régime forestier est destinée à la construction d’un ensemble de 150 maisons individuelles « ce qui est incompatible avec une jouissance destinée seulement aux associés et un objectif de gestion purement patrimoniale du bien immobilier concerné. »

Donc l’intention spéculative doit être regardée comme établie, et ce dès l’acquisition du bien.

Sur les 150 lots constitués initialement,

- La plupart ont été vendus entre 1960 et 1982,

- Un lot a été cédé en 2001, un autre en 2002, deux autres en 2003 deux autres en 2005.

-Deux opérations sont réalisées en 2006 et une en 2007.

- En 2016, vente du lot restant, un terrain à bâtir de 42 hectares, composé de deux parcelles, et une parcelle de terre inconstructible de deux hectares.

Il résulte de ceci : « de par leur pluralité et leur fréquence, et nonobstant leur étalement sur une longue période, ces opérations de revente ont revêtu un caractère habituel. »

Que la dernière vente en 2016, réponde à la nécessité de faire face à des difficultés financières « n’est pas de nature à remettre en cause le caractère habituel et spéculatif de l’opération. »

Décide :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

(…)

Cour de cassation du , arrêt n°DÉCISION DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE TOULON DU 22 DÉCEMBRE 2023, N°2100544

Commentaire de LégiFiscal

Une partie du terrain est destinée à la construction d’un ensemble de 150 maisons individuelles.

Il ne s’agit donc pas d’une seule gestion patrimoniale, destinée aux associés.

« de par leur pluralité et leur fréquence, et nonobstant leur étalement sur une longue période, ces opérations de revente ont revêtu un caractère habituel. »