Injonction de payer : délégation pour former opposition

Jurisprudence
Recouvrement des impayés

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Contexte de l'affaire

Dans une récente décision, la Cour de cassation s’est prononcée sur la recevabilité d’une opposition à une injonction de payer réalisée par une personne ayant reçu une délégation de pouvoir postérieurement à la réalisation de cette opposition (Cour de cassation, chambre civile 2, 18 janvier 2024, n°21-23.033).

Injonction de payer et opposition

L’injonction de payer est, avec le référé-provision, la principale démarche judiciaire permettant à un créancier d’agir en cas d’impayé. Le créancier doit rédiger une requête à adresser au tribunal compétent.

Si le juge estime la requête justifiée, il rend alors une ordonnance portant injonction de payer qui devra être notifiée par le créancier au débiteur.

Le débiteur dispose d’un mois à partir de la date de signification de l’ordonnance d’injonction de payer pour faire opposition auprès du tribunal. Le tribunal convoque alors les parties en tentant de concilier leurs positions. Le tribunal rend alors un jugement qui peut faire l’objet d’un appel.

Lorsque le débiteur ne conteste pas l’injonction, le créancier peut demander au greffe d’apposer la formule exécutoire sur l’ordonnance. Cette formule permet ensuite au créancier de faire saisir le débiteur en faisant appel aux services d’un commissaire de justice (ex-huissier).

Les faits

Dans l’affaire dans laquelle la Cour de cassation a récemment eu à se prononcer, un créancier a déposé une requête en injonction de payer au titre de factures impayées par un débiteur. Le tribunal rend une ordonnance pour injonction de payer le 11 septembre 2017 mais le débiteur forme opposition le 14 novembre 2017.

L’opposition est cependant signée par une personne qui n’est pas le mandataire de la société débitrice et qui ne dispose pas d’une délégation de pouvoir pour réaliser cette démarche. La personne en question deviendra gérante de la société le 6 janvier 2018 avec effet au 31 décembre 2017. Afin de couvrir cette irrégularité, la société débitrice fournit au tribunal un pouvoir daté du 30 octobre 2017 et signé par la gérante en poste à cette date.

Dans un arrêt rendu le 27 juillet 2021, la cour d’appel de Pau estime qu’il n’est pas prouvé que ce pouvoir ait une date certaine. Aucun élément n’atteste de l’authenticité de la date du pouvoir. La régularité de l’opposition n’est selon la cour d’appel pas établi. Le débiteur se pourvoit alors en cassation.

La décision de la Cour de cassation

Dans sa décision rendue le 18 janvier 2024, la Cour de cassation rappelle que selon une jurisprudence constante, l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription et de forclusion. L'opposition à une injonction de payer, même irrégulière, qui saisit le tribunal de la demande initiale du créancier et de l'ensemble du litige, interrompt le délai d'opposition. Sa régularisation reste ainsi possible jusqu'à ce que le juge statue.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Pau et renvoie l’affaire devant la cour d’appel de Bordeaux.

Source : Cour de cassation, chambre civile 2, 18 janvier 2024, n°21-23.033

Cour de cassation du

Commentaire de LégiFiscal

L'opposition formée contre une injonction de payer, même irrégulière, interrompt le délai d'opposition. Sa régularisation, par exemple par la remise d’une délégation de pouvoir du gérant envers la personne ayant réalisé l’opposition, reste ainsi possible jusqu'à ce que le juge statue.