Valeur vénale en matière successorale, et importance des éléments de comparaison et de moins-value du bien

Jurisprudence
Fiscalité Plus-values immobilières

Pour l'administration fiscale, elle peut rectifier l'évaluation d'un bien lorsqu'elle lui paraît inférieure à sa valeur vénale réelle au jour du décès. Pour cela elle utilise la méthode par comparaison de biens intrinsèquement similaires mais non strictement identiques, comme le permet une jurisprudence.

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Contexte de l'affaire

Décédée en 2013, Mme O, veuve R, a établi ses trois petits neveux par alliance légataires universels.

Elle était propriétaire de sa résidence principale, évaluée à la somme de 2 370 000 euros dans la déclaration de succession. Ce bien a été vendu le 10 juin 2014 pour un prix de 2 920 000 euros.

Faisant suite à un contrôle de la déclaration de succession, l'administration fiscale a estimé que la valeur déclarée de ce bien était de 2 827 000 euros.

Une proposition de rectification a été envoyée à Mme C. M.

La commission de conciliation a maintenu la valeur proposée par l'administration.

Elle a déposé une réclamation contentieuse qui a été rejetée.
Elle a fait assigner la Direction régionale des finances publiques devant le tribunal judiciaire de Paris.

Le tribunal judiciaire de Paris a statué :

- La valeur vénale de l'immeuble doit être fixée à la somme de 2 600 000 euros ;

- Rejette le surplus des contestations ;

- Condamne le directeur général des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris aux dépens et à payer à M [C] [M] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Directeur régional des finances publiques a interjeté appel de ce jugement.

Pour l'administration fiscale, elle peut rectifier l'évaluation d'un bien lorsqu'elle lui paraît inférieure à sa valeur vénale réelle au jour du décès.

Pour cela elle utilise la méthode par comparaison de biens intrinsèquement similaires mais non strictement identiques, comme le permet une jurisprudence.

M. M. soutient avoir apporté la preuve de l'exactitude de la valorisation.

Pour la cour

Il appartient à l'administration de justifier de l'évaluation et ce, en fonction d'éléments de comparaison suffisants portant sur des biens intrinsèquement similaires.

Elle estime, par comparaison avec trois cessions de biens similaires

L’évaluation proposée par la contribuable, concerne six cessions.

Pour l’administration, elles ne sont pas pertinentes.

Eléments de moins-value.

Dans le rapport d'expertise le bien, construit en 1959, est à rafraichir, et les prestations de bonne qualité sont en état d’usage, l’électricité, la plomberie … doivent être modernisées.

Pour M.M. les derniers travaux datent de 1976.

Quant aux dépendances, le studio situé en sous-sol, semi-enterré, ne dispose ni de WC privatif, ni de cuisine; Il est non louage en l'état.

Quant au droit de jouissance exclusive du toit, il est limité par le règlement de copropriété et il ne s'agit nullement d'un droit de propriété.

La localisation est excentrée, et il y a l’impact de l'importante circulation et l'absence de vue dégagée


L'administration présente 3 termes de comparaison.


Deux de ces termes de comparaison se situent dans des quartiers plus recherchés

L'appartement en litige est situé a proximité du périphérique (recouvert à cet endroit)

Le premier élément de comparaison retenu par l'administration est une adresse prestigieuse, appartement avec une vue exceptionnelle, localisation objectivement pas similaire à celle de l'appartement en litige.

Le second terme concerne un appartement situé au cœur d'une rue commerçante, éloigné du boulevard périphérique.

Seul, le 3e bien, peut être considéré comme étant similaire.

La valeur vénale dépend à la fois de facteurs physiques, surface, date de construction, qualité architecturale, état d'entretien et de vétusté.


Statuant à nouveau, il sera jugé que Mme C. M. justifie, de l'exactitude de la valeur déclarée dans le cadre de la déclaration de succession de Madame R., soit la somme de 2 370 000 euros.

PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme la décision déférée en ce qu'elle a jugé que l'administration n'avait pas suffisamment tenu compte des éléments de moins-value affectant le bien ;

Et statuant à nouveau,
Fixe à la somme de 2 370 000 euros la valeur vénale de l'immeuble ;

Déboute le Directeur régional des Finances Publiques d'Ile de France et de Paris de l'ensemble de ses demandes ;
Ordonne la décharge intégrale des rehaussements mis à sa charge par l'administration fiscale ;

Condamne l'administration fiscale aux entiers dépens .
(…)

Cour de cassation du , arrêt n°Arrêt de la Cour d'appel de Paris du 9 septembre 2024, n° 22/14444

Commentaire de LégiFiscal

L'administration peut rectifier l'évaluation d'un bien si elle paraît inférieure à sa valeur vénale réelle, sous réserve d'en apporter la preuve.

Pour la jurisprudence, la méthode par comparaison est privilégiée, avec des termes de comparaison portant sur des biens intrinsèquement similaires.


La Cour a jugé que l'administration n'avait pas suffisamment tenu compte des éléments de moins-value.